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Petit clin d'oeil ! |
La délocalisation au sens propre du terme consiste pour une entité économique, une entreprise industrielle ou de services, à transférer une partie ou la totalité de ses activités ainsi que tout ou partie de ses capitaux, mouvement ayant généralement des répercutions au niveau de l'emploi. Nos amis anglo-saxons parlent de "offshoring". Il s'agit alors de transférer une partie de ses opérations dans des zones géographiques (pays ou continents) où les coûts salariaux sont bas et la compétitivité meilleure. Il existe en effet des endroits dans le monde qui parviennent pendant un laps de temps à se créer des avantages compétitifs liés à des facteurs différents qui peuvent être par exemple le coût de la main-d'oeuvre, une fiscalité plus avantageuse, des réglementations moins lourdes et plus attractives, des compétences très spécifiques, un environnement plus favorable, etc. La bonne nouvelle pour nous européens convaincus, français en premier lieu, est que les concurrents d'hier (l'Inde, la Chine, etc.) seront à leur tour concurrencés par d'autres pays issus des BRICs comme la Russie, l'Afrique du Sud ou le Brésil, mais aussi par des pays moins industrialisés mais qui dans les services s'avèrent redoutables, comme le Vietnam ou l'Indonésie. Nous tenons notre revanche ! Trêve de plaisanterie, nous voyons bien que pour nous, de toute façon, cela va très être dur. Et rien ne va s'arranger si les autres agences de notation nous enlèvent également notre triple A. Selon Jean Arthuis, les « Les délocalisations industrielles consistent à séparer les lieux de production ou de transformation de marchandises des lieux de consommation ». C'est une bonne définition car elle établit bien la frontière entre ceux qui conçoivent, fabriquent, produisent, réalisent de ceux qui consomment et dépensent. Dans la chaîne de valeurs, c'est là une différence majeure. On oppose alors très vite le "local" au "non local" ou encore au "global", certains parlant même du "glocal", affirmant que produire ailleurs mais consommer sur place est une façon de rester "national". C'est effectivement sans doute mieux que de fermer les portes de son entreprise et licencier ! Mais nous comprenons sans mal que la solution à nos maux ne viendra pas à coup de délocalisations. Dans certains cas, elle peut même sauver des situations désespérées, mais ce n'est que du court terme.
En France, nous avons de nombreux atouts. Nous avons tendance à les oublier, à les faire passer en second plan. Nous avons tendance à nous blâmer. Nous avons une formidable infrastructure, homogène sur l'ensemble du territoire, c'est attractif. Nous avons également des formations de très grande qualité. Sciences Po Paris est une institution reconnue dans le monde entier, l'environnement diplomatique en particulier, HEC Paris est la première "Business School" européenne, Polytechnique, Normale Sup ou les Mines Paris forment une élite d'ingénieurs, chassée par tous, la Chine et les Etats-Unis en premier lieu, et nos universités ne sont plus en reste (Dauphine, Sorbonne Business School, etc.). Nous sommes reconnus dans de nombreux secteurs comme le Luxe, la Gastronomie ou le Vin. Certaines entreprises restent des fleurons comme l'Oréal, Michelin ou Renault Nissan. Nos banques ne sont jamais mal classées. Nous avons des points à faire valoir. Alors que faire ? Que faut-il faire face à l'Offshoring croissant, sachant que nous ne sommes pas le seul pays européen à le subir, nous serions même peut-être celui qui résiste le plus. Vouloir ré-industrialiser la France est une bonne idée, nous avons entendu les messages de campagne. Mais le faire ne va pas être simple. Dans certaines branches des services non plus. Il arrive que les coûts journaliers d'un ingénieur informatique varient du simple au triple entre la France et d'autres pays. Difficile de lutter.
Pour s'en sortir, il faut analyser ce qui marche et qui fait la différence. La France, comme tout pays du reste, est performante dans les secteurs où elle parvient à différencier son offre. Dès lors que nos produits ou nos services présentent une valeur singulière, on gagne. Il ne s'agit plus uniquement de compétitivité mais de différenciation. La banalisation nous tue à petit feu. Elle autorise tous les débordements. Elle est la fin des modèles occidentaux. D'où la nécessité d'innover en permanence pour toujours être un cran devant. Il faut donc probablement renoncer à certaines activités, celles où le chemin sera trop long, semé d'embuches. Il faut donc disposer d'un plan pour détecter très vite là où nous devons investir et le faire.
Nous préconisons quelques actions simples:
• désinvestir des secteurs à faible croissance ou sans réelle différenciation pour nos industries ou nos entreprises de services ;
• identifier à l'inverse ceux qui devraient nous permettre de nous distinguer en nous permettant d'établir des avantages compétitifs;
• réorienter nos formations, pour nos jeunes, mais aussi construire des filières permanentes pour les adultes en réorientation (la GPEC, la Gestion prévisionnelle des Emplois et des Compétences, est et sera de ce point de vue un outil précieux);
• se donner les moyens en réorientant les investissements dans les bons secteurs;
• nommer des leaders adaptés à ces challenges, capables de bouger vite, courageux;
La délocalisation n'est pas un objectif pour la plupart des entreprises françaises, elle est plutôt une conséquence de notre état économique. Il faut aider les entreprises, les industries en particulier, à diminuer leurs coûts salariaux. Il faut réduire les charges le plus vite possible, sans cela nous allons assister à la mort de certains segments d'activités.
La délocalisation n'est pas un sujet tabou. Elle n'est pas non plus une fatalité. Elle est juste un problème auquel il faut s'attaquer ... avec vigueur !