28 octobre 2012

La France engage un tournant déterminant pour son positionnement futur

Mon post du jour vise à réfléchir à la France d'aujourd'hui. Ou plutôt de livrer quelques réflexions personnelles issues de mes discussions professionnelles ou privées. Egalement de ce que j'observe ci et là. 
D'abord, il faut admettre que la crise commence à se faire sentir. J'ai le privilège d'appartenir à quelques cercles de réflexion qui réunissent des leaders et des dirigeants de tout secteur, et je dois constater que partout le discours est le même : le marché se tend et devient plus difficile. Jamais le chômage n'avait atteint de tels seuils, nous avons passé la barre des 10% et des 3 millions d'actifs sans travail. Difficile d'imaginer que l'on puisse casser cette course en avant. Si nous passons la barre des 3,5 millions, tout deviendra plus compliqué.
A cela se rajoute un climat politique et social tendu. Les entrepreneurs sentent l'étau se refermer sur eux. D'où les mouvements qui se multiplient. De nombreux amis autour de moi, qui sont plein d'idées, des créatifs à l'état pur, songent à partir. Sérieusement, je veux dire. Pas juste des mots en l'air. Ils ont pris des contacts et envisagent de délocaliser leur entreprise, ou de se lancer mais pas en France. Il faut dire que les prévisions actuelles ne sont pas engageantes. Problème, ce sont des emplois qui filent, du leadership qui s'évapore, des bénéfices qui ne se feront pas sur notre terre. 
Beaucoup de gens autour de moi sont frustrés de voir les questions relatives au mariage homosexuel (qui cache un problème plus important, celui de la filiation) ou de l'acquisition de la nationalité française au coeur des débats actuels alors qu'ils sont convaincus que l'urgence est ailleurs. Je suis par nature quelqu'un d'ouvert, persuadé que le monde avance et qu'il ne faut jamais résister aux mouvements de fond. Mais il y a un temps pour tout, nous le savons bien. Il en est ainsi depuis la nuit des temps. Ce sont des débats importants, qui me tiennent à coeur, mais n'ont-ils pas raison en affirmant qu'ils n'arrivent pas au bon moment ? Je n'ai pas la réponse mais il me semble qu'effectivement d'autres sujets sont plus brulants. Plus déterminants pour l'avenir de notre pays. Les gouvernements doivent établir des priorités comme les dirigeants le font pour leur entreprise. On ne peut pas tout faire en même temps. Ou au final on perd sur tous les fronts. Quand nous aurons 3,5 ou 4 millions de chômeurs, quand nous aurons définitivement perdu notre triple A, quand les investisseurs mettront leurs fonds ailleurs qu'en France, alors il sera trop tard. Il faut se concentrer sur l'économique pour pouvoir alors faire du social et pas l'inverse. Mais économique ne veut pas dire de la spéculation. Il faut établir des fondations solides, reconquérir les leaderships que nous avions autrefois dans certaines industries, comme le textile ou l'horlogerie. Il faut se bouger et vite. La vitesse est une condition du succès. Elle permet d'emballer le moteur et de ne pas se laisser glisser lentement dans une sorte de paralysie gangréneuse. 
Il faut en premier lieu relancer l'économie, rendre la France plus compétitive en baissant les charges qui pèsent sur les entreprises, mettre en place une politique pour attirer l'investissement étranger (avec conditions) comme les américains le font, aider les jeunes pousses par un véritable système d'incubation (au niveau national). Il faut différencier les entreprises qui prennent des risques et embauchent de celles qui ne le font pas. Il faut favoriser l'innovation. Il faut faire en sorte que les ingénieurs français ne quittent plus la France pour aller travailler dans les laboratoires américains et chinois, mais qu'ils aient les moyens de rester en France pour conduire leurs recherches. Il faut inciter les jeunes filles à aller vers les filières scientifiques pour que l'on puisse rapidement établir de véritables rééquilibrages hommes-femmes au sein des entreprises. 
J'aime la France. Je n'ai jamais imaginé la quitter. J'ai certes passé dans ma vie du temps au Japon, en Russie et plus récemment trois ans aux Etats-Unis, mais il s'agissait d'un parcours de carrière, pas d'un exil financier ! Je vivrais peut-être un jour ailleurs qu'en France, qui peut savoir, mais la finance ne gouvernera jamais ma vie. L'argent est important, mais rien ne vaut que de choisir l'endroit où l'on veut vivre, se lever le matin. Rien ne vaut que de se sentir chez soi. Bien sûr je souffre de voir mon pays s'enfoncer dans une crise sourde et douloureuse, chaque jour un peu plus, de voir se multiplier les sans-abris dans la rue (c'est même incroyable). Je constate de plus en plus que beaucoup de gens vivent des souffrances psychologiques traumatisantes. Je constate que la violence gagne un peu partout, à un niveau qui devient inquiétant. Nous ne pouvons pas balayer tout cela d'un revers de main. Mais il me semble que je pourrais davantage servir les miens et mon pays en restant là à pied d'oeuvre pour résister, construire, aider. Je le fais aussi bien que possible à la tête de l'entreprise que j'ai la chance de diriger. Je le fais en enseignant à HEC Paris le leadership pour transmettre mes idées, pour que les dirigeants de demain aient une démarche plus équilibrée, un management dynamique, performant, mais sans doute plus social. Discours démagogique. Bien sûr, je prends le risque d'en faire sourire certains, mais qu'importe, je suis persuadé que nous sommes à un moment charnière. L'Europe est un vieux continent, plombé par des décennies de combats sociaux, qui ont beaucoup apporté à la qualité de nos vies, mais qui ont aussi rendu nos économies non compétitives face aux nouveaux pays émergents, les BRICS comme on les nomme, Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Il faut admettre cela et comprendre que les réformes sont indispensables. Certaines vont être douloureuses. Mais faut-il partir pour autant ? Chacun apporte sa réponse. Pour ma part, je n'ai certainement pas le désir d'être un pigeon, mais pas plus que de fuir ailleurs ... je veux rester et redoubler d'énergie pour que la France reste la France. La France a inspiré le monde pendant des siècles. Nous continuons à représenter quelque chose de fort et nous sommes toujours la cinquième puissance mondiale en PIB ! 
Je voudrais partager avec vous ce texte de Guillaume Lange qu'il m'a adressé. C'est un éclairage différent et intéressant. Il y a là des réflexions justes, on se rejoint du reste sur certains points, mais pas sur tous. 

22 octobre 2012

Notre besoin de parler et d'échanger ...

Alors que je faisais mon footing dans Paris ce dimanche, le temps était radieux du reste, j'ai pris conscience que les bars branchés s'étaient multipliés comme des petits pains. La décoration est en général très tendance et l'ambiance dynamique. On ne vient plus là que pour boire un verre entre amis, mais aussi pour faire des rencontres, connaitre des gens, de nouvelles personnes, se mettre en réseau comme on dit. Sur un plan plus personnel, on vient aussi y chercher l'âme soeur. Bref, dans tous les cas, on veut faire des rencontres. 
C'est assez paradoxal quand on y songe puisque nous sommes justement à l'ère des réseaux virtuels, de l'internet, de Facebook, de Linkedin, et d'autres réseaux sociaux qui nous incitent inconsciemment au retranchement. S'ils ont leurs vertus (je suis moi-même sur Linkedin et comme vous le savez j'ai un blog (:-)), nous connaissons les limites et les dangers de tout excès, le numérique n'échappant pas à la règle. On connaissait "un verre, ça va, deux (ou trois) bonjour les dégâts !", on pourrait avoir "une à trois heures de connexion ça va, 5 à 6 heures bonjour les dégâts !". 
Donc bonne nouvelle la société génère toujours ce désir de contacts physiques, de dialogues, d'échanges. Pour le commercial que je suis, c'est rassurant et même rafraichissant. Tout ne se passe pas à coup de clavier. Il faut les deux. Ils sont certainement complémentaires.
Il faut admettre que les mises en relation sont plus complexes qu'avant.
Trouver un emploi est complexe.
Trouver des amis n'est pas si simple (excepté ceux que nous avions déjà !).
Trouver l'âme soeur devient hasardeux. Comment évaluer les valeurs partagées de nos jours ? 
Trouver des collègues avec qui on peut partager ses réflexions sur l'avenir ? Sur l'entreprise de demain par exemple.  
Trouver des investisseurs pour se lancer ... complexe aussi. 
Trouver des partenaires pour monter une société, des hommes et des femmes qui partagent les mêmes goûts, les mêmes passions, voilà encore un beau challenge. 
Tout est devenu plus compliqué. Les réseaux nous aident à établir des liens mais ensuite rien ne remplace la confiance d'un sourire, d'un regard, d'une poignée de mains. Hum ... cela me va. 
Au travail, la transformation des bureaux en "open spaces" (plus conviviaux mais moins confidentiels) et la nouvelle loi interdisant la cigarette dans les lieux publics ou de travail, ont engendré un changement là aussi assez majeur. La machine à café, la fameuse machine à café, s'est déplacée à l'extérieur des bâtiments, au moins pour les fumeurs. Ils prennent leur café (à la machine à café ou ailleurs) et sortent dehors avec leurs collègues d'affinité pour fumer et avaler des gorgées de caféine. Même les non fumeurs sont tentés de les rejoindre. En fait, c'est assez sympa de se trouver là, dans un groupe ! Au final, ce sont là des moments de convivialité, où l'on apprend à se connaitre, à se voir de façon différente. 
Au-delà de ces contacts humains, éternels, nécessaires, il y a une volonté forte de conserver cette petite différence qui fait de nous des êtres humains, l'espèce la plus évoluée qui peuple la terre. Cette petite différence se traduit par le langage. Parler un code commun permet d'échanger des émotions, de motiver d'autres personnes pour atteindre des objectifs ambitieux. Cette petite différence nous permet chaque jour d'innover. Elle nous permet de créer, d'apprendre, d'enseigner, de discuter, de débattre, d'être d'accord ou pas. Elle permet de pousser nos limites toujours plus loin, de faire montre de nos intelligences. Le langage est un véhicule de changement. Grâce à lui, un jour, l'être humain a conçu l'écriture, puis d'autres techniques, et un jour l'ordinateur, mais au final tout vient de là. Ce qui distingue l'homme de l'animal c'est avant tout la langage. Pas uniquement, mais en premier lieu. 
C'est bien cet élément fondamental que l'on cherche à retrouver en allant fumer une cigarette à l'extérieur des bâtiments, en prenant un café à la machine avec des amis ou collègues, en allant dans un bar le jeudi soir pour un "happy hours"ou en recréant des atmosphères de convivialité dans les immeubles modernes. Nous sommes en quête de sens. En quête d'un langage commun qui ne soit pas qu'informatique. Pas que numérique. 
Je voudrais partager avec vous un de mes derniers interviews, papier paru dans le journal la Tribune (en cliquant sur les photos, vous pouvez lire ou imprimer l'article) :


14 octobre 2012

Thoughts about success, leadership, effectiveness and the impact of our priorities / Réflexions sur le succès, le leadership, l'efficacité et l'impact de nos priorités (english and french versions)


Success is an equation. I read this some years ago. I was not convinced. I thought it was a kind of “cliché”. In this paper, do not remember the author, it was said that success is a combination of several ingredients: talent, effort and luck. Thinking about it some years after, I feel this is quite true. When you play to the lottery, your success or failure is 100% linked to luck. Some effort in fact to go and play … but let’s admit this is not indeed a big one. No talent required. When you become rich because of a specific business you launched a long time ago, a lot is due to talent and effort, some to chance. Whatever the way you take it, success is an equation of these three elements, knowing that the pourcentage will change over time and will vary from one person to another. It is then better to keep this in mind.
Based on this experience, I then wondered if some other sentences or remarks had retained my attention these pas few years. I held some that I would like to share with you. They bring thoughts and discussion. And this is certainly what matters the most at the end.  Here they are:
  • ·       From Lou Gerstner: “act with the sense of urgency” and “inspect what you expect”. On the first, we can see how important is the fact to make decisions. It is better to move and be right 80% of the time, than being static. If you are you will for sure make no or less mistakes, but your business will collapse.  The second one is even more important. It says that people will see in what you inspect what are your priorities. You would better select this carefully and keep them for a while. Changing would put your team in trouble and make them sure that they have not to focus on this so much because in 3 months from now you will change your area of interest again.
  •       "Do not strive to be a leading company, strive to lead". Do not remember who is the author. However this is a quite important one. We all know companies that are not the leader of one specific segment (in terms of revenue for example) while they are leading the market and influencing people. This is true for leaders as well. People with a strong ego, talking only about them, are generally people with a lot of problems. Indeed what is true for people is true for companies and vis versa. 
  •       "Why better is better than best". This one speaks by itself. I let you thing about it and agree or disagree.
  •       "Our priorities reveals our values". Probably the one I feel the more. We said before that not changing what we expect and then inspect too enough is key, which is true, and that these priorities will reveal what counts for you. But not only. It reveals more. It reveals what you have in mind. The sense you want to be in everything you do. Quite important indeed. Think about what you boss is articulating and you will see several things : his values, what he is expecting from you and the team and finally if yours are matching to the ones he is driving.  

Le succès est une équation. J'ai lu ceci il y a quelques années. Je n'ai pas été convaincu immédiatement. Je trouvais qu’il s’agissait là d’un cliché convenu. Dans ce papier, dont je ne me rappelle pas du nom de l'auteur, il était dit que le succès est une combinaison de plusieurs ingrédients : le talent, l’effort et le facteur chance. En y pensant quelques années plus tard, j'estime que ceci est plutôt juste. Quand vous jouez à la loterie, le succès ou l'échec est lié à presque 100 % à la chance. Un peu d'effort en fait pour aller sur place et jouer … mais l’effort requis reste raisonnable. Aucun talent n’est exigé. Pour réussir dans les affaires, la création d’une entreprise par exemple, il faut beaucoup de talent et d'effort, et un peu de chance. Quelque soit la voie que vous empruntez, le succès est donc une équation formée de ces trois éléments, sachant que le pourcentage changera au fil du temps et variera d'une personne à un autre. Il est plutôt mieux d’avoir ceci à l’esprit.
Fort de cette expérience, je me suis alors demandé si d’autres phrases ou remarques avaient retenu mon attention ces dernières années. Je souhaite en mettre quelques unes en évidence. Elles amènent la réflexion. Et c’est bien cela qui compte au final. 
Les voici :
  • De Lou Gerstner: « agir avec vitesse » et « faire des revues sur ce qui compte pour vous ». Celui ou celle qui a fait des affaires sait qu'il est préférable de bouger vite, quitte à se tromper 20% du temps. C'est préférable que de rester statique. Car ne pas bouger évite des erreurs certes, mais vous fait courir le risque d'aller dans le mur. La seconde est vitale. Au travers des priorités que vous fixez, vos équipes vont lire ce qui compte pour vous. Autant ne pas se tromper ! Par ailleurs, vous avez intérêt à ne pas en changer trop souvent. Les changer tous les 3 mois par exemple aurait pour conséquence de démobiliser vos équipes et de perdre par ailleurs votre crédibilité.
  • "Ne vous efforcez pas d'être en pôle position de leader, efforcez-vous d'être le guide". Je ne connais pas l'auteur et la traduction est très personnelle. C'est ainsi que je la sens. En réalité, ce que dit cette citation, que je crois juste, est qu'il n'est pas forcément essentiel d'être le numéro 1 d'un secteur, il est plus fondamental d'être le guide, celle ou celui que l'on suit, dans ses idées, sa démarche, etc.
  • "Pourquoi le mieux est mieux que le meilleur". Celle-ci parle d'elle-même et mérite réflexion. Je vous laisse la méditer, sachant que vous serez peut-être d'accord ou pas au final. 
  •  "Nos priorités révèlent nos valeurs". Probablement celle qui a le plus de sens et de valeur à mes yeux. Nous avons dit plus haut que nos priorités permettaient de révéler ce qui compte à nos yeux et qu'en changer était dangereux car le risque de démobilisation est réel. Mais en réalité, nos priorités révèlent plus que ça. Elles traduisent l'état de nos valeurs les plus profondes, ce que nous sommes, ce que nous voulons accomplir et par voie de déduction ce que nous attendons des autres. Si les valeurs de nos collaborateurs sont incompatibles avec les nôtres, il est peu probable que cela dure très longtemps. Inversement, si tel est le cas, alors les équipes passeront en vitesse accélérée car ils auront plus que jamais le désir d'accomplir leur tâche pour servir quelque chose qui leur tient particulièrement à coeur.    

07 octobre 2012

La colère en entreprise ...

La colère est un sentiment complexe, consécutif à une frustration, à une douleur, à un manque cruel, à une absence durement ressentie ou  à une blessure. Du moins sous l'angle de la psychologie. Comme le choléra, elle vient du nom grec kholê, qui signifie la bile ! Cette association est amusante, surprenante, et pas dénuée d'intérêt. On ressent bien qu'à certains moments, quand on laisse échapper ses humeurs, on perd le contrôle de soi, un peu comme si nous étions rongés par un mal diffus, un choléra justement, qui viendrait à disparaitre, une fois la tension atténuée. 
Pour comprendre les tenants et les aboutissants de la colère, il faut lire Camus, Spinoza et en prenant quelques distances, Aristote et Sénèque. Ce dernier, stoïcien, explique bien dans son traité sur ce thème les mécanismes de la passion de la colère. 
Le mot est lâché. La colère est une passion. Ou une forme de passion. Une expression de sentiments intimes qui ne peuvent plus être maîtrisés et qui sont lâchés d'un coup, comme s'il fallait qu'ils sortent, qu'ils soient exprimés, pour mieux aller alors, comme s'il s'agissait d'être exorcisé.  Ce qui n'est pas garantie du reste, car bien souvent, après une colère, on ne va pas forcément mieux ! On peut s'en vouloir furieusement, surtout si elle était injuste et non maîtrisée. Lorsque cette dernière est aveugle et dévastatrice, c'est à dire gratuite et sans volonté de critique positive, elle peut exprimer une forme de fureur qui ne débouche généralement que sur des sentiments négatifs, la peur ou le rejet par exemple. Ce qui n'est guère propice au progrès.
La colère est-elle alors souhaitable en entreprise ? 
La réponse ne peut être tranchée aussi clairement. La colère rentre dans le champs des émotions et nous avons déjà pu dire que maîtriser ses émotions était une qualité forte et déterminante du leader moderne. En réalité, si l'intelligence analytique, le fameux QI, reste un atout majeur, seule, elle ne peut faire la différence. Il faut lui associer d'autres formes, dont l'intelligence émotionnelle. Or, l'intelligence émotionnelle, mesurée cette fois par le QE, le quotient émotionnel, regroupe la connaissance de soi, la maîtrise de soi et l'autonomie,  la gestion de la motivation, l'empathie et les compétences sociales ("social skills"). Nous comprenons aisément que la colère constitue une forme d'absence de maîtrise de soi, et donc potentiellement une défaillance d'un des éléments constituants de l'intelligence émotionnelle. Pour autant, la colère exprimée, avec une volonté de construire, une volonté d'avancer, porte en elle de nombreuses vertus. Vous exprimez par cette humeur courroucée votre vision des choses, vos idées, et bien souvent vos valeurs, qui viennent se placer au dessus de tout. 
Nous sortons de nos gonds en général quand on vient empiéter sur quelque chose qui vous tient à coeur. 
Celui qui perd le contrôle de lui-même en permanence n'est pas crédible. On dira de lui qu'il est soupe au lait, qu'il est incontrôlable, pas maîtrisable, dangereux, et que cela cache un manque de confiance ou des incertitudes. Il est vrai que ceux qui meuglent en permanence se servent bien souvent de leurs aboiements comme un paravent pour masquer leurs défaillances. 
Inversement, extérioriser ses sentiments, ses idées et surtout ses convictions les plus sincères, les plus profondes, même sous la forme d'une colère, peut être très bénéfique. Elle vous permet de marquer vos limites, vos lignes de démarcation, ce qui compte pour vous et ce qui compte moins, elle vous permet de ne pas laisser la nonchalance et les attitudes passives et négatives s'installer confortablement autour de vous. La colère permet bien souvent de remettre les pendules à l'heure, de rappeler qu'au fond vous n'allez pas transiger sur vos valeurs essentielles, celles de l'entreprise qui plus est, que vous n'allez pas laisser s'installer les dérives, que vous allez au contraire les prendre à la gorge et les tacler. 
Rares sont les patrons et dirigeants qui n'ont pas exprimé leur colère en certaines occasions. Ces épisodes, dès lors qu'ils servent l'entreprise et sa bonne marche, dès lors qu'ils ne viennent pas humilier ou atteindre quelqu'un dans sa chair, ce qui serait alors désastreux (on peut être en colère tout en restant respectueux des individus), dès lors qu'il n'y a aucune violence caractérisée, dès lors qu'ils restent exceptionnels, ont des avantages. Cette expression a entre autre le mérite de nous rappeler que nous restons des hommes et des femmes,  chargés d'émotions et que nous agissons souvent avec passion, par passion ou tout en passion. Plutôt rassurant ! 

01 octobre 2012

L'élégance

L'élégance est l'une des caractéristiques les moins discutées dans les théories du leadership et du management. Pourtant, elle est non seulement utile à l'acte de direction mais elle est aussi nécessaire à l'établissement de bonnes relations au sein de l'entreprise. Elle permet de créer du bien-être, propice au bout du compte à la performance. 
Pourquoi dans ces conditions un tel oubli ? Ou plutôt pourquoi un tel désintérêt ? Les chercheurs ne s'y précipitent pas. Les entrepreneurs et les managers ne s'y arrêtent pas plus. Personne ne semble s'en soucier. 
Il eut un temps, pas si lointain, où nous l'aurions examiné comme une règle standard de l'éducation d'un jeune homme ou d'une jeune fille. Un règle de bonne conduite en quelque sorte. Comme la courtoisie ou la politesse.
Il eut été une autre époque où nous l'aurions étudié en cours d'instruction civique, comme un devoir, un acte citoyen, responsable, respectueux, un acte marquant d'une part le respect que l'on doit à autrui et d'autre part ce petit quelque chose qui distingue l'individu cultivé et éduqué d'un être plus rustre, ceci étant totalement indépendant de la condition sociale. Il y a longtemps que nous savons que richesse ne rime plus forcément avec éducation. Aujourd'hui on peut gagner beaucoup d'argent, dans le show-business, dans le sport, dans l'entrepreneuriat, au jeu, sans avoir du style, de la grâce et du savoir-vivre. On peut devenir riche par hasard et n'avoir ni manières ni subtilité. 
Non, la véritable raison est ailleurs. 
Elle vient du fait qu'aujourd'hui, notre vie s'est profondément modifiée. Grâce au progrès technique, l'internet, les médias, la télévision, les réseaux, tout s'est accéléré, tout va beaucoup plus vite. Nous nous moquons bien de l'élégance. Où plutôt nous n'avons pas le temps de nous en préoccuper. On fait tout très vite. On ne prend le temps de rien. Ni d'expliquer, ni de discuter, ni de comprendre, ni d'écouter. On veut tout, tout de suite. Du moins, on veut tout le plus vite possible. Seul le résultat compte. Et je ne dis pas qu'il ne compte pas. Je suis le premier à le réclamer, parfois affamé de victoires ! 
Je dis seulement qu'il n'y a pas que le résultat qui compte. 
Dans ce monde moderne, on zappe ce qui ne compte pas. L'élégance fait partie de ces actes ou de ces qualités qui n'ont pas vraiment de valeur aux yeux de beaucoup. Et sans valeur, il n'y a pas de prix ! Alors on zappe. L'élégance du coup se voit suspendue, comme en apesanteur. Elle n'a pas disparu. Elle a été mise de côté parce qu'on ne sait plus quoi en faire. Elle peut même à la limite faire ridicule ! Qu'un leader, homme ou femme, en soit pourvu et on s'en étonne. On ne valorise pas celui ou celle qui la détient. On ne pénalise pas plus du reste celui ou celle qui en manque. 
L'élégance ne fait pratiquement plus partie des valeurs regardées et considérées. Tout simplement. Devant son inutilité, on a de façon intrinsèque décidé de la répudier. 
Sauf que certaines personnes la revendiquent. Ils ne voient pas les choses ainsi. Combien de managers commencent leurs emails par "bonjour", "bonsoir" ou "comment ça va" ? Combien de managers vous demandent vraiment comment vous allez ? Combien de managers prennent le temps de mettre les formes dans tout ce qu'ils font ? Combien de managers utilisent les bonnes formules, les bonnes expressions, prenant en considérations vos points ? 
Je ne peux ignorer que rien n'est simple de nos jours et que le temps nous prend de court bien souvent. Il m'est arrivé si souvent de m'en vouloir de ne pas être assez vigilant à cet égard ... on ne fait jamais vraiment ce que l'on devrait. 
Mais si l'on peut vouloir gagner un match, le gain de la partie ne suffit pas. Du moins pas à tous. Plus à tous. La victoire est plus belle quand on a bien joué, quand on y a mis son âme, quand on a été solidaire et ... avec la manière ! Gagner, oui bien sûr c'est bien, mais avec panache et style c'est mieux. 
Avec une certaine  élégance en somme.