26 octobre 2013

Il faut lire ou relire "L'horreur économique" ...

Viviane Forrester

De formation économique, il était peu probable que je m'intéresse à un ouvrage économique écrit par une romancière. C'est pourtant ce que je fis à la fin des années 90 lorsque je lus d'un trait le pamphlet écrit par Viviane Forrester, née Dreyfus en 1925. Son titre était "L'horreur économique" (aux Editions Fayard) et comme beaucoup, il m'avait attiré. Le titre est important. Il est comme un "teasing", la promesse de quelque chose, que l'on trouve ensuite ou pas. Je n'avais pas été déçu. Au contraire. 


D'abord, le livre est très bien écrit. Forcément, l'auteur est une femme de talent. Prix Fémina Vacaresco pour un ouvrage sur le peintre Van Gogh, prix Goncourt pour une biographie sur Virginie Woolf, elle reçut le prix Médicis pour celui dont il est question dans ce billet. 

Ensuite, elle dit des choses vraies. Elle avance des faits qui interpellent, qui font réfléchir. 

Lorsqu'elle est morte en Avril 2013, j'avais ressorti le livre. Je l'ai posé sur une étagère et je le voyais presque tous les jours en me disant que cela vaudrait le coup de le relire. Mais je ne l'ai pas fait avant hier soir, faute de temps. Pourquoi suis-je donc passé à l'acte ? Parce qu'en me baladant dans les allées d'une grande librairie parisienne, je suis tombé sur "La promesse du pire" (Viviane Forrester, Le Seuil, 2013). Une sortie à titre posthume. Alors qu'elle était en train de l'écrire, la mort est venue la faucher, l'empêchant de terminer. Je l'ai acheté, mais surtout je me suis dit que j'allais relire "L'horreur économique". 

Et j'ai compris que cet ouvrage était très visionnaire, précurseur de ce que nous vivons aujourd'hui. Certes, les économistes n'y trouveront pas de longs développements théoriques, mais qu'importe. Ce manifeste est brillant et juste. Je n'ai pas encore lu la suite, mais j'ai eu envie de vous dire d'aller parcourir les pages de ce livre. Bonne lecture !

21 octobre 2013

Offrons une véritable liberté d'action à nos politiques !

Tout le monde est unanime sur la nécessité de réformer la France. Nous avons de fantastiques atouts, c'est indiscutable. Et pourtant la France est contestée plus que jamais sur la scène internationale. 


Au-delà de notre histoire et des secteurs sur lesquels nous sommes traditionnellement en pointe, comme la haute gastronomie, le vin, le luxe, certains secteurs industriels (comme l'aéronautique), les télécommunications, nous disposons des meilleures formations au monde et de centres de recherche réputés. L'Isère est par exemple la deuxième place européenne pour l'innovation en photonique ou en nanotechnologies et Grenoble figure en 5ème position mondiale des villes innovantes selon le dernier classement Forbes. Une référence qu'il faut mettre à l'actif de la région et de son député-maire, Michel Destot. On nous envie notre système de santé, nos écoles, notre infrastructure routière et autoroutière et bien d'autres éléments encore. 

Alors dans ces conditions, pourquoi projetons-nous cette image plus que mitigée à l'extérieur ? 

Les raisons sont multiples. D'abord, parce la France, comme l'Europe, n'est pas au mieux. Le chômage s'intensifie, la croissance semble en berne et les déficits se creusent. Tout ce qui précède constitue effectivement ce que nous pourrions appeler de bonnes fondations. Le problème est qu'elles coûtent très cher. En a-t-on encore les moyens ? Bien sûr que non. On ne peut pas continuer à offrir les retraites d'antan, d'où la nécessité de réformes, on ne peut pas continuer d'attribuer les mêmes niveaux d'allocations à tout le monde ... nous sommes à bout de souffle. Nous devons élaguer. Il ne s'agit d'abandonner ce qui fait notre force mais de constater que nous ne pouvons pas poursuivre ainsi, sans changement. 

La gestion d'un pays ressemble à celle d'une entreprise, en plus complexe. Il existe un ratio magique dans l'entreprise, celui de la marge brute générée par l'activité opérationnelle sur les dépenses effectuées pour l'obtenir. Lorsqu'on ne génère plus assez de marge, on doit se rabattre sur le dénominateur et tailler dans les dépenses afin de rester compétitif. L'exercice consiste alors à faire la distinction entre celles que l'on peut couper vite et les autres. Pour l'Etat Français, la logique est assez similaire. Les dépenses publiques s'établissent à environ 1100 milliards d'euros (soit environ 57% du PIB). C'est beaucoup. Une réduction de 5% nous apporterait un bol d'air. 5% cela ferait 55M€. Cela ne parait pas énorme et pourtant nous en sommes loin.

Pour réduire notre train de vie, pour relancer notre économie, pour donner l'image d'une France dynamique et forte, il faut des leaders éprouvés, complets, courageux, qui ne regardent que la tâche qu'ils ont à accomplir. C'est pourquoi, en toute modestie, conscient des difficultés que représente l'art de gouverner, je fais quelques propositions simples pour lancer le débat :
  • Un président devrait être élu pour 7 ans (le temps de faire des réformes de fond) ;
  • Le mandat ne pourrait pas être renouvelé (son action ne serait plus ainsi perturbée par de basses considérations de réélection, du moins pas la sienne) ;
  • Les membres du gouvernement (ensemble des ministres) ne pourraient cumuler avec aucune autre fonction politique (nationale ou locale) ; 
  • Pour couvrir le risque que cela représente, les salaires des membres du gouvernement seraient augmentés de façon significative. Un ministre doit gagner autant qu'un chef d'entreprise de bonne taille. D'autant plus qu'il serait attendu sur les résultats ; 
  • Un ministre ne pourrait être nommé que sur un domaine où il possède des compétences reconnues ; 
  • Chaque ministre se verrait confier des objectifs annuels et serait évalué selon ces critères (doit-il faire l'objet d'une variabilité de son salaire ? Je n'ai pas d'avis tranché sur la question) ; 
  • Personne ne pourrait être nommé ministre sans remplir un certain nombre de conditions :
    • avoir passé un certain nombre d'années en entreprise ou dans des activités de conseil ;
    • avoir été en région ;
    • avoir occupé des fonctions à l'international ; 
    • connaitre les institutions et rouages de l'administration française ;
    • être irréprochable en ce qui concerne l'éthique et le comportement, l'exemplarité étant primordiale ; 
    • plus d'autres critères à définir mais l'esprit est là ... 
  • Pour donner de la France une image plus positive, les ministres et députés seraient tenus à un nombre minimum de communications externes (médias) mettant en avant les plus de la France. On pourrait tout à fait demander la même chose aux grands dirigeants de firmes, en particulier à celles et ceux qui se trouvent aux commandes des entreprises publiques ou para-publiques. 
Sur ce dernier point, j'ai pu constater à maintes reprises que les pires représentants de la France à l'étranger sont justement ... les Français qui s'y trouvent ... Ce n'est pas toujours le cas bien sûr, mais c'est quand même récurrent, au point que certains parlent d'un syndrome français

Il nous faut une classe politique de compétition. Et de la même façon que l'on passe des années à développer des talents et hauts potentiels dans l'entreprise, il faudrait faire de même en politique. Bien sûr, on sait repérer les talents. Un normalien ou un énarque, la tête bien faite, les idées ordonnées, un charisme naturel, va attirer l'attention. Pour autant, cela ne fera pas de lui le leader passionné, courageux, capable de résister à toutes les pressions pour réformer, prendre les bonnes options (parce qu'il connait l'entreprise, l'économie, le social et l'international). On peut être parfait sur le papier et inapte au commandement, incapable d'inspirer et de guider les autres. Il faut avant tout être capable de positionner la France dans un contexte plus global. 

Il y a de mon point de vue urgence à agir en ce sens. Un chef d'entreprise n'ayant aucune compétence sur la "chose publique" ne sera pas un bon ministre. La politique est un métier qui s'apprend et qui est très dur. Les exemples d'échecs sont nombreux du reste. Inversement, un "pur" profil politique ne peut réussir dans le monde d'aujourd'hui, au risque d'apparaitre totalement décalé des réalités qui l'entourent. 

Il faut construire une filière et préparer les femmes et les hommes aptes à transformer la France pour qu'elle rayonne encore et toujours. Ce n'est pas simple, il n'y a pas de solution facile, ce n'est du reste pas spécifique à la France seule, mais dans tous les cas, il y a urgence.

Nos hommes politiques (femmes et hommes) actuels sont pris en étau. La plupart d'entre eux sont très bons. Ils sont brillants dans tous les sens du terme. Mais ils sont aussi et surtout coincés entre ce qu'ils aimeraient faire et ce qu'ils pensent pouvoir faire. L'échéance électoral suivante les bloque. C'est "schizophrénique" pour ceux qui aiment agir. Ou ceux qui voudraient le faire. Alors donnons leur une véritable liberté d'action !

13 octobre 2013

"Le pouvoir de la communication transparente" par Meg Whitman

Comment mieux interagir avec vos employés quand l'entreprise bat de l'aile ? Meg Whitman, PDG de HP, dévoile les procédés employés par la direction dans le cadre de la restructuration de l'entreprise.




Dans l’une de mes premières publications, j’ai défini un certain nombre de principes de leadership qui sont essentiels à la bonne restructuration d’une entreprise. Dans le cadre de mon partage d’idées et de mises à jour concernant la restructuration de HP, l’un des sujets que je souhaite tout particulièrement approfondir est l’importance de pratiquer une communication ouverte et transparente.


Meg Whitman, CEO HP
Une piètre communication ne nuit pas seulement à la collaboration et à l’exécution des tâches au sein de l’entreprise, mais elle s’exprime aussi invariablement à l’extérieur de la société, à travers les ventes, le service client ou la relation de l’organisation avec ses partenaires.

Améliorer notre façon de communiquer et de travailler ensemble dans l’entreprise a été l’une de mes priorités depuis le jour de mon arrivée chez HP. Les idées qui vont suivre correspondent à quelques-uns des changements auxquels nous avons aspiré pour toute l’entreprise. Elles peuvent s’appliquer à n’importe quelle entreprise en activité.

Sachez commencer petit

Lorsque je suis arrivée chez HP, je me suis retrouvée face à une entreprise divisée en silos.
Ces divisions cloisonnaient les salariés en fonction des caractéristiques géographiques et des différentes branches, mais elles constituaient souvent une séparation très marquée entre la direction et les employés.

Rien ne symbolisait davantage cette séparation que les bureaux des postes exécutifs et ce que j’appelais la « barrière commando », une clôture imposante en barbelés qui entourait le parking réservé à la direction. Les bureaux fermés et cette barrière au style militaire représentait très justement à quel point HP s’était écartée de la culture insufflée par les fondateurs de l’entreprise.

L’une de mes premières actions a été de détruire la clôture et d’installer tous les postes exécutifs dans des bureaux à cloisons. Nous rentrons maintenant tous par la même porte que les employés.

Cela constituait un premier symbole de la culture que nous souhaitions bâtir. Et dans des organisations aussi grandes que la nôtre, le symbolisme joue un rôle très important. Ce que vous exprimez à travers vos actions, des choses qui sont visibles par 320 000 personnes, font véritablement la différence.

Communiquez le problème, mais concentrez-vous sur les solutions

Alors que notre plan de restructuration de HP progresse à grands pas, on ne peut nier que l’entreprise refait surface après plusieurs années éprouvantes. Depuis que j’ai rejoint HP, nous avons mis un point d’honneur à aborder ce sujet de manière franche et directe avec nos clients, nos employés, nos investisseurs et nos partenaires. Cela implique de diagnostiquer les problèmes, mais plus particulièrement, de prévoir clairement la manière dont nous allons arranger les choses.

Un exemple récent : la Global Partner Conference de HP. Avec plus de 100 000 partenaires dans le monde entier, notre réseau est essentiel au succès de l’entreprise. Afin de réaffirmer notre engagement envers nos partenaires après une période d’incertitude, nous avons été sincères et avons reconnu qu’ils avaient dû faire face à de nombreux défis.
Mais nous nous sommes surtout concentrés sur ce que nos partenaires avaient envie d’entendre, à savoir des projets concrets visant à assurer notre succès mutuel à l’avenir.

Responsabilisez votre personnel

Vous pouvez améliorer l’infrastructure de votre entreprise et initier de multiples projets en provenance de la direction, mais vous ne ferez pas de progrès à moins de gagner le cœur et l’esprit de vos employés. Il est capital que ceux-ci s’identifient au projet et qu’on leur donne les moyens de provoquer le changement sur le terrain.

Chez HP, nous cherchons à impliquer et responsabiliser au maximum notre personnel dans le monde entier. Par exemple, en février dernier, pour la première fois, nous avons organisé une rencontre en personne entre tous les vices présidents et country managers de l’entreprise (1 100 personnes au total). Nous avons insisté sur leurs rôles de leaders, notre stratégie et les initiatives clé à appliquer dans l’ensemble de l’entreprise. Nous avons créé un environnement où il était possible de parler de questions épineuses et de collaborer afin de trouver des solutions pour les résoudre.

Il est essentiel de ne pas reculer devant les questions difficiles et de favoriser la communication à tous les niveaux de l’entreprise pour faire en sorte d’appliquer notre stratégie et de fonctionner comme une entreprise unie.

Une transparence cohérente

De nos jours, si une entreprise veut réussir, elle s’assurer que toutes les parties prenantes de l’organisation – employés, clients, investisseurs – perçoivent très clairement la stratégie et les résultats de l’entreprise, qu’ils soient bons ou mauvais.

Dans cette optique, nous avons recours à une approche plus proactive que ce qui a été fait par le passé chez HP en termes de communication externe. Cela inclut une nouvelle plateforme en ligne, HP Next, que nous avons lancée très récemment en tant que page d’accueil  pour toutes les mises à jour concernant la restructuration de HP. Nous utilisons d’ores et déjà ce site pour communiquer d’importantes mises à jour concernant l’entreprise, comme par exemple le futur directeur de notre conseil d’administration.

Tous les changements cités ci-dessus peuvent aider une entreprise à renforcer sa culture et ses relations avec toutes les parties prenantes, mais mon conseil aux autres dirigeants d’entreprise est le suivant : l’amélioration de la communication, tout bien considérée, dépend de l’implication et du respect des engagements de la part des employés à tous les niveaux de l’entreprise. C’est ce que j’essaye de renforcer chaque jour au sein de mon équipe. Je leur demande de se promener dans les bureaux et de rendre visite à leurs employés.

Allez directement parler à vos équipes plutôt que de leur envoyer des e-mails. Si vous montrez aux gens que vous êtes conscient des défis, des problèmes et que vous vous en occupez activement, cela fera la différence. Au bout du compte, améliorer la communication au sein de l’entreprise est un processus continu qui dépend de l’action individuelle de chacun : de nouveaux outils et initiatives ne vous mèneront pas bien loin.

Traduction par Joséphine Dennery, JDN.

09 octobre 2013

Mille milliards de dollars ...

Mille Milliards de Dollars, c'est :
      
- Un film d'Henri Verneuil
- Une belle distribution : Patrick Dewaere, Caroline Cellier, Charles Denner, Anny Duperey, Jeanne Moreau
- Un sujet d'actualité, la mondialisation et ses effets ; l'appât du gain et ce que certains sont prêts à faire pour en avoir plus encore.

En clair, un film éternel.

Et il l'est. D'abord, Patrick Dewaere confirme dans ce film qu'il était le plus doué de sa génération. Magistral. Ensuite, le film pourrait avoir été tourné aujourd'hui ! 

Pas une ride en fait. Un journaliste d'investigation qui enquête sur une histoire de pot de vin découvre bientôt qu'il a levé une affaire bien plus importante. 

L'acuité avec laquelle Verneuil décrit celles et ceux qui sont prêts à tout (ou presque) pour gagner toujours plus, pour faire grimper le cours d'une action ou pour l'emporter coûte que coûte, est édifiante ... ou sordide, c'est selon. Sordide est pourtant finalement le bon mot lorsque l'on songe à la cupidité de certains, à leur dédain aussi pour le genre humain. 

La globalisation des affaires, l'impact des multinationales sur ce qu'on appelle déjà le capital humain, la cruauté de certains leaders, tout cela fait un peu froid dans le dos, quand on sait où nos économies en sont 30 ans plus tard. Assez bien vu en fait. 

La concentration des entreprises, regroupements qui permettent des économies d'échelles, font que peu à peu quelques sociétés se voient en position de dominer le monde et de contrôler la finance mondiale.  D'autant plus que ce qui est décrit dans le film n'a fait que s'amplifier au cours des dernières décennies. 

Il faut écouter les dialogues entre Dewaere et le patron de GTI (société qui incarne les multinationales) pour mesurer la justesse de l'analyse (sans parler de l'affaire elle-même qui fera un jour l'objet d'un second post)

Bien sûr, il faut relativiser. De très nombreuses sociétés ne fonctionnent pas ainsi, beaucoup ayant déjà basculé dans un monde différent, ordonné par de nouvelles règles et normes. 

Le revoir est finalement très instructif. Bon film !