Dans la littérature anglo-saxonne, on les appelle les « inspirational leaders ». Ce sont ces êtres rares qui par leur personnalité, leur caractère, leur énergie, leur passion, parfois leurs idées, inspirent des hommes et des femmes au point de les entrainer avec eux, dans leurs rêves les plus fous. Ces leaders — charismatiques par nature — sont généralement ce que l’on appelle des narcissiques au sens freudien du terme. Ils ont sur les « suiveurs » (« followers ») un impact très significatif. Non maitrisés, du moins contrôlés, ils peuvent être dangereux pour la société qu’ils gouvernent. Les exemples dans l’histoire de l’humanité ou celle des entreprises ne manquent pas. Le plus connu, mais aussi le plus dramatique, est celui d’Hitler. Mais qu’est-ce qu’un leader « inspirationnel » (celui ou celle qui inspire) ? Pour illustrer la réponse et la rendre plus évidente, prenons l’exemple du film Braveheart.
Tout le monde a entendu parlé de ce film et beaucoup l’ont vu. Le rôle principal est joué par Mel Gibson. Le personnage de Braveheart a existé. Il s’appelait très exactement William Braveheart Wallace. Il a vécu de 1270 à 1305). Il correspond parfaitement à l’idée que l’on peut se faire d’un leader « inspirationnel ». Tentons une définition : le leader qui inspire est celui capable de motiver les autres dans l’accomplissement d’un acte héroïque ou extraordinaire, d’une action difficile à atteindre. On peut retrouver des « inspirational leaders » un peu partout. Ce sera le chef militaire à la veille d’une bataille, le coach sportif à la veille d’un match décisif, le dirigeant lors d’une convention d’entreprise ou l'homme politique lors d’une campagne.
Pour ceux qui ont vu le film, rappelez-vous du discours de Wallace juste avant la bataille de Stirling Bridge. Il dit : “ I am William Wallace. And I see a whole army of my countrymen, here in defiance of tyranny! You have come to fight as free men. And free man you are! What will you do without freedom? Will you fight? ” En français : “ Je suis William Wallace. Et je vois une armée de compatriotes, en défiance de la tyrannie. Vous êtes venus pour vous battre en homme libre. Et vous l’êtes ! Que feriez-vous sans liberté ? Vous battriez-vous ? ”.
Certains diront : « C’est un film ». Certes, c’est un film, mais pour ceux qui ont lu l’histoire du véritable Wallace, nous en sommes très proches et la démonstration de leadership « inspirationnel » est éloquente. Que fait-il ? Il positionne l’enjeu. Le but. Ils ne sont pas là pour battre les anglais, beaucoup plus nombreux, mieux équipés, plus forts sans doute, du moins au sens de l’expérience militaire. Non ils sont là pour se battre et garder leur … liberté ! Le but est fixé. Tout va devenir différent. Le leader doit impérativement se souvenir que fixer l’objectif, celui qui fera que tout le monde pourra se reconnaître, est fondamental.
Alors que se passe-t-il ? Généralement il y a toujours un homme, respecté, celui que l’on écoute, qui se met en travers, qui met en doute l’objectif poursuivi. Ici, c’est un ancien qui crie : “Fight? Against that? No, we will run; and we will live. ”
“Nous battre? Contre eux ? Non, nous allons fuir, et nous vivrons …”.
Mettons nous à la place des soldats voyant l’armée anglais face à eux au moment précis où, l’ancien respecté et écouté, leur dit à demi-mot, si vous y allez, vous allez juste … mourir ! Il y a de quoi prendre ces jambes à son coup. Et c’est justement à ce moment précis que leader doit se sortir les tripes et trouver les mots pour ne perdre personne. Pour au contraire les rassembler et les entraîner vers la victoire.
Wallace répond: “Aye, fight and you may die. Run and you’ll live … at least for a while. And dying in your beds, many years from now, would you be willin’ to trade all the days, from this day to that, for one chance, just one chance, to come back here and tell our enemies that they may take our lives, but they’ll never take … our freedom! ”.
Il leur dit en fait : “Oui, battez-vous et peut-être allez-vous mourir. Si vous fuyez, vous vivrez … au moins pour un moment”. À ce stade Wallace reconnaît les propos de l’ancien … mais pour mieux positionner sa riposte derrière qui ne tarde pas à venir … ; Il poursuit alors sur l’idée suivante : allez-vous négocier les jours qui vous séparent de votre mort pour cet instant de vérité, celui où vous allez dire, tous ensemble, à nos ennemis, qu’ils peuvent prendre nos vies mais pas notre … liberté !
Et là il revient vers le thème central de la mobilisation qu’il recherche. Motiver ses hommes sur un thème fort en émotions, porteur de valeurs, de fierté et d’enjeux qui dépassent l’intérêt individuel, la peur, la mesquinerie, quelque chose qui dépasse l’humain …
Nous connaissons le résultat. Les hommes furent transcendés et en dépit du bon sens battirent l’armée anglaise qui sur le papier ne pouvait pas être défaite. Mais la force d’un homme peut contrarier les meilleurs plans !
Même si fort heureusement, nos choix ne sont pas aussi périlleux dans notre vie quotidienne ou professionnelle, c’est cela même le leadership « inspirationnel » !