La présidente du MEDEF — Laurence Parisot — était l’invitée en fin de soirée du « Grand Jury RTL – Le Figaro-LCI ». Interrogée sur les questions relatives à la rémunération des dirigeants, elle a pu affirmer ses positions. Un peu plus tôt, François Bayrou s’était également exprimé sur ces sujets, poussant à la suppression des stock-options pour les dirigeants du CAC 40, tout en concédant l’intérêt d’un tel système pour les PME-PMI. Essayons d’analyser les points de vue, tout en donnant notre opinion.
1) L’Etat veut interdire les parachutes dorés et le versement de rémunérations excessives pour les entreprises ayant bénéficié de son soutien financier du fait de leurs difficultés économiques. La patronne des patrons a clairement soutenu cette position. Nous aussi. Nous allons même un peu plus loin en suggérant que ces principes s’appliquent à toute entreprise qui se trouverait dans le rouge ou qui serait contrainte d’engager un plan social. Il serait aberrant ou paradoxal — en particulier vis-à-vis des clients — de se trouver dans une situation inverse.
2) Faut-il pour autant légiférer ? Laurence Parisot pense que si l’intervention de l’Etat parait légitime, une loi ne pourrait en rien régler tous les cas de figures possibles. Elle n’a pas tout à fait tort ? Néanmoins, nous pensons qu’une loi ou un décret aurait au moins le mérite de poser des jalons.
3) Le code éthique défini par le Medef et l’Afep peut servir de garde-fou pour certains capitaines d’industrie hésitant sur la démarche à adopter dans certaines situations sensibles. C’est du moins ce que pense la chef de file du patronat français. Ce n’est pas faux. Nous allons dans son sens lorsqu’elle affirme que la plupart des patrons sont honnêtes. Beaucoup ont par exemple renoncé à leur bonus ou à de nouvelles attributions de stock-options d’eux-mêmes, parce que cela faisait sens. Il serait bon de ne pas faire des quelques dossiers récents et fortement médiatisés un cas général. Non, tous les patrons ne sont pas pourris ! Loin s’en faut, l’amalgame n’est pas acceptable. L’exemple des entreprises ayant mise en place des chartes d’entreprises — fixant très clairement les limites des règles de conduite dans les affaires — vient étayer la proposition de Laurence Parisot. En effet, dans la plupart des cas, elles ont été efficaces, suivies par l’ensemble des salariés qui s’y référent dans leurs actes quotidiens. Cela n’est cependant pas antinomique avec l’idée de faire voter une loi ou de faire passer un décret. Ce code de déontologie pourrait s’avérer insuffisant s’il n’était pas selon nous renforcé par l’existence d’une législation plus officielle.
4) Concernant les stock-options, elle affirme que ce système a le mérite « d'attirer, de conserver, de faire grandir les talents, de les motiver». Nous ne pouvons qu’être d’accord avec elle puisque c’est là-même l’objectif principal de ce mode de rémunération. C’est en premier lieu un outil de rétention des talents. Nous partageons néanmoins la réserve formulée par François Bayrou lorsqu’il affirme que la logique même des stock-options a tendance à pousser les dirigeants qui en bénéficient à agir dans le seul but de favoriser la valorisation boursière. Tout le monde est alors conditionné à aller dans une seule direction. Le système est pervers et dangereux sur le long terme. Certains projets — clés pour le futur de l’entreprise — peuvent être différés ou éliminés lorsqu’ils ne s’inscrivent pas dans un schéma de ROI court, parfaitement mesurable. Si les allocations de stock-options ont généralement des échéances longues (3, 4 ou 5 ans) — afin de bénéficier à plein de l’avantage fiscal qui y est attaché — leur valorisation est exclusivement liée à des critères financiers, et même plus précisément à la progression de l’action sur les marchés. Pourtant, il ne serait pas absurde de prendre en compte d’autres paramètres comme : la part des investissements réalisés par l’entreprise, les emplois créés sur plusieurs années, le pourcentage de formations offertes aux salariés ou les sommes consacrées à la Recherche et Développement. Il est bien sûr impossible à une firme de changer son système de façon unilatérale. Il doit être uniforme, au moins au niveau d’un pays, pour éviter des effets collatéraux, comme par exemple une fuite massive de capitaux. Nous sommes favorables à la distribution de plans de stock-options ou d’actions gratuites, en ce sens qu’ils permettent de créer un lien de solidarité entre ceux qui en reçoivent et la direction générale qui définit les axes stratégiques. C’est pourquoi nous pensons qu’il faut descendre le plus bas possible dans l’organigramme et motiver par ce biais un pourcentage élevé de la population totale. C’est sans aucun doute une condition essentielle de succès dans le futur.
5) Laurence Parisot a également rappelé avec justesse que les mandataires sociaux ne peuvent pas — en principe — cumuler ses responsabilités avec celles d’un contrat de travail, ce qui sur le plan du droit est parfaitement juste. Il existe certes quelques cas d’exceptions où le cumul peut être justifié et validé, mais cela devrait rester exceptionnel.
Terminons en rappelant que les dirigeants-fondateurs ou dirigeants-actionnaires prennent de très gros risques en engageant leurs propres capitaux et qu’il est normal qu’ils en retirent en contrepartie des avantages financiers conséquents (valorisation de leur investissement, dividendes, etc.…). Juste rémunération de leur prise de position.