16 mars 2014

A-t-on besoin d'un chef ?


Un chef ?

Invité à un diner il y a peu, je me suis retrouvé assis à côté d'un professeur en université et chercheur en sciences sociales. Nous étions une bonne quinzaine et les profils étaient variés. 

... ou pas de chef ? Plutôt une équipe !
A un moment donné de la soirée, la discussion s'est portée sur la nécessité ou pas d'avoir un chef. J'ai tendu l'oreille, le sujet m'intéressait. Certains affirmaient qu'il en fallait un, que nous étions fait pour être dirigés et que sans patron, tout allait habituellement à vau-l'eau.  D'autres au contraire soutenaient qu'il n'en était rien et que le monde d'aujourd'hui n'avait nullement besoin d'organigrammes structurés et de systèmes de management élaborés pour que les choses avancent dans la bonne direction. Le professeur était plutôt du côté de ceux qui voulaient des chefs. 

"Et vous ?" me demanda-t-il, étonné de mon silence. 

J'étais en fait trop occupé à écouter. Il est toujours intéressant d'écouter et il est difficile de ne pas parler. On comprend pourtant mieux les argumentaires. Je ne parle pas des idées mais des logiques qui sont utilisées, c'est-à-dire la façon dont les idées sont articulées entre elles pour former une position, un point de vue. Cela fait longtemps que j'ai compris qu'on pouvait faire "thèse-antithèse" sur presque tout. Sur un sujet donné, on peut avoir mille points de vue. Ce qui compte au final, ce n'est pas tant cela, mais le raisonnement qui est tenu. On peut défendre une position à un instant t et quelques mois après une autre sans que cela soit forcément choquant, tout est question de moment et de contexte. 

"Les recherches en éthologie sur le règne animal transposées à l'homme semblent montrer que nous avons besoin d'un chef, lui dis-je. 
- Vous avez raison.  Au bout du compte, même si nous prétendons vouloir plus de liberté, savoir qu'il y a un pilote dans l'avion nous rassure. Vous ne trouvez pas ?
- Je ne sais pas. En fait, ce n'était pas mon avis, mais le résultat de recherches dont je voulais simplement faire état. 
- Mais alors vous votre avis c'est quoi ? 

Avant la guerre, le top du top c'était de passer le bac philo. On était sur les idées. Une femme ou un homme éduqué était avant toute chose cultivé, lettré et capable de manier la langue avec dextérité. Après la guerre, on est entré dans la phase de reconstruction. L'industrie devait être reconstruite et l'ingénieur a pris les rênes du pouvoir. Très vite sortir de Polytechnique ou des Arts et Métiers était préférable à une agrégation de lettres ou de philo. 

Pendant les trente glorieuses (les années 50, 60 et 70), les organisations étaient structurées, hiérarchiques, centralisées en ce qui concerne l'exercice du pouvoir. Le chef a pris toute sa place. C'est lui qui décide, commande, ordonne, structure, nomme, licencie. C'est le chef omniprésent et responsable. Il y a là un rien de paternalisme. Du reste, des grands noms émergent, des entreprises qui portent le nom de leur fondateur. L'entreprise s'identifie à un homme ou une femme. A ce moment là, il faut un chef. 

Avec l'avénement de l'informatique personnelle, puis des réseaux sociaux, de l'internet, l'information se libère, les organisations deviennent moins formelles, on fonctionne en réseaux, on a plusieurs patrons, un hiérarchique et un ou plusieurs fonctionnels et le pouvoir se décentalise. Les délégations arrivent sur celles et ceux qui sont proches du terrain et qui, mis en pouvoir, peuvent décider, accélérer les processus de décision et gagner en vitesse d'exécution. Le pouvoir central perd en contrôle et c'est pourquoi on invente le principe de la gouvernance. 

La gouvernance est un moyen de substituer aux structures pyramidales habituelles un autre forme de contrôle. 

On est passé d'un modèle dit mécaniste à une approche dite organique. Dans le premier cas, il y a un chef. Dans le second, il y en a plusieurs ou pas, cela dépend de la façon dont on veut définir un chef. 

J'ai terminé ainsi : "Vous voyez le monde a profondément changé en quelques décennies et l'entreprise a dû s'y adapter. Même si la notion de chef ou patron a évolué dans le temps, nous avons toujours besoin de quelqu'un pour prendre les décisions importantes ... les directions. On parle du reste de dirigeant ! Celui qui dirige, qui guide, qui trace la route."

Mais rentré chez moi, j'ai poursuivi mes recherches. J'ai trouvé deux articles intéressants, qui n'embrassent pas le même point de vue, mais qui sont intéressants tous deux. 

Les voici : 



A vous de vous faire une opinion ! Bonne lecture.