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04 octobre 2015

C'est le moment de nous demander si nous avons les bons leaders en place ?

Sommes nous bien gouvernés ? De toujours, cette question alimente les débats, les discussions de comptoir dans les bars de quartier et les échanges animés à la machine à café. Nous avons tous notre avis sur la question. Nous observons les dirigeants d'entreprises et les leaders politiques et nous nous forgeons une opinion sur eux. Cette position est souvent définitive. Il y a une raison à cela. 

Mais avant de voir cela, une autre question se pose à nous : jugeons nous avec les bons critères ? 

Elle est en réalité toute aussi importante que la première. Peut-être l'est-elle même davantage ?  

Alors même que l'Occident, France en tête, est le temple de la rationalité, nous concentrons généralement notre analyse sur des critères extérieurs généraux, tels que l'énergie déployée ou la clarté des propos. Un tribun de scène sachant restituer en des termes simples sa vision du monde de demain a toutes les chances de plaire. Et ceci qu'il soit engagé en entreprise ou en politique. C'est pour cela que nous ne changeons que très rarement d'avis. Parce que nous n'allons que très rarement dans le fond des choses, par manque de temps essentiellement. Les politiques le savent bien et jouent sur tout le reste pour influencer nos choix. 

Pourtant, nous savons bien que l'essentiel n'est pas là. Certes, bien présenter, bien communiquer et avoir du charisme sont des éléments déterminants, mais ils ne peuvent suffire à orienter un navire dans la bonne direction. 

Du moins plus aujourd'hui. Nous sommes en effet entrés dans une transformation profonde de notre société, des entreprises en particulier. Nous sommes en "disruption" selon le terme consacré. Toutes les activités, tous les secteurs d'activité, tous les métiers, sont en passe d'être revisités par de nouveaux entrants, les "nouveaux barbares" comme titrait récemment le journal "Le Point". Maurice Levy, patron de Publicis, a trouvé cette formidable formule lors d'une interview au magazine Fortunes "tout le monde peut être ubérisé !". Tout est dit ! 

Il se dit que nous aurions produit plus de données dans les deux dernières années que depuis la naissance de l'humanité ! S'il est sans doute difficile de vérifier cette statistique avec une certitude absolue, nous mesurons bien l'enjeu et l'ampleur des mouvements engagés. Les applications se multiplient, les réseaux sociaux explosent, le monde vacille. Les objets connectés, le "cloud", le "big data" sont des termes techniques certes, mais connus à présent de tous. Car en quelques années, l'informatique a été rebaptisée. On ne parle plus de systèmes d'information mais de numérique ou de digital. En quelques temps surtout, les présidents de sociétés, leurs comités de direction plus généralement, se sont emparés de la question "numérique", conscients de son importance, des enjeux financiers qui lui étaient attachés et des conséquences possibles dans l'hypothèse où certains virages ne seraient pas pris. 

Le leader de demain, dirigeant d'entreprise ou politique, doit assurément comprendre ce monde en mouvement. Il doit se l'approprier, prendre conscience que plusieurs générations sont et vont se côtoyer à ses côtés, sans se comprendre parfois, les uns étant des "digital natives" ou presque, les autres d'une époque plus lointaine. Ces derniers, du moins la plupart d'entre eux, tentent de se raccrocher aux branches, et la plupart se débrouillent finalement très bien. Et cela tombe bien. 

Il n'est en rien question d'âge ici. La bêtise n'attend pas les années pour s'imposer et les plus expérimentés ne sont pas forcément les plus réfractaires à la technologie et plus largement au progrès technique. 

Quand on voit la vitesse à laquelle des secteurs se voient chahutés par des nouveaux entrants. L'hôtellerie avec Airbnb ou booking.com, les logisticiens avec Amazon, la SNCF avec Blablacar ou les réseaux par car, etc.,  les exemples ne manquent pas, on se dit qu'actuellement mieux vaut connaitre ses gammes ! 

Du coup, l'expérience accumulée compte bien moins aujourd'hui. Car la plupart du temps, elle devient plus ou moins obsolète dans les deux ans qui suivent. Bonne nouvelle, nous sommes confrontés à une obligation de compétence et de résultat ! 

Il est temps de disposer des leaders 
aptes à construire le monde de demain

Les questions à se poser sont alors simples. 

S'il s'agit d'un dirigeant d'entreprise :
  • Est-il en train de prendre les bonnes options sur le marché ? 
  • A-t-il une bonne compréhension des enjeux du numérique et de ses conséquences possibles sur l'entreprise ? 
  • S'est-il bien entouré ? A-t-il positionné des Gen Y, les plus jeunes, aux côtés de Gen X ou de babyboomers pour bénéficier à plein de leurs atouts respectifs ? 
  • Va-t-il au contact des équipes, des clients, de son écosystème pour s'imprégner des mouvements qui se produisent tout autour de lui ? 
  • Est-il capable de prendre les bonnes décisions pour éviter le pire à l'entreprise ? 
  • Et bien d'autres points bien sûr ...
Au final, les conseils feraient bien de s'en assurer. Car si des groupes comme AXA ou Accor ont pris le sujet à bras le corps, d'autres peinent à décoller un premier niveau d'analyse. 

S'il s'agit d'une femme ou d'un homme politique, les questions sont un peu les mêmes. Mais l'absence de compréhension de ce monde numérique qui se profile sous nos yeux est quasi éliminatoire. 

De nombreuses enquêtes montrent qu'aujourd'hui réussir la mutation numérique est une condition de survie pour de nombreuses entreprises. Dans tous les cas, en ne prenant pas aujourd'hui certains virages technologiques, on se prépare des lendemains très douloureux. 

Il en est de même bien sûr en politique. Je ne donne bien entendu aucun conseil, souhaitant garder une parfaite neutralité, mais il est un fait que nous jouons ces prochaines années une partie très importante. La gagner c'est mettre la France ou l'Europe si nous voyons plus large, sur les bons rails. La perdre c'est la garantie de décrocher face à la redoutable férocité des adversaires.

Nous n'avons donc jamais eu autant besoin de leaders adaptés au monde de demain, tant en politique que dans les affaires. Les critères sont la définition d'une vision simple et claire, une parfaite compréhension des enjeux du numérique, une écoute active, un sens de l'humain et de l'émotionnel (on veut s'éloigner du fameux QI), une certaine distance par rapport aux approches de court terme, etc.

Fort de cela, lorsque vous voterez, dans la solitude de l'isoloir, songez à ces qualités requises et faites les bons choix. Fort de cela, cette grille de référence à l'esprit, que vous ne manquerez pas de développer, vous saurez si le ou les leaders de votre société sont à même de vous entrainer vers la lumière !

Une chose est certaine, la compétition fait rage. Ces dernières années, la France a perdu son 5ième rang mondial au profit du Royaume-Uni. Certes, nous disposons de nombreux atouts, mais encore faut-il que nous fassions les bons choix en matière d'investissement, sur le plan des secteurs d'activités à développer ou des formations à adapter, etc.

Toutes ces décisions conditionnent en réalité ce que nous serons dans 5 à 10 ans ! Est-ce terrifiant ou au contraire excitant ? Je vous laisse juge, mais en tout état de cause, telle est notre feuille de route. 

21 septembre 2015

Un post de mon réseau : Où sont nos leaders ?

Je vous propose cette semaine ce post d'Emmanuel Toniutti, sur un thème qui m'est cher : le leadership.
 
Le titre du post est plus exactement : "où sont nos leaders ?"
 
Avec tous les événements de ces dernières années, c'est une question légitime. Emmanuel y répond avec un ton et des idées qui lui sont propres.

 
Je vous laisse parcourir son texte, vous faire une idée et apporter vos commentaires dans linkedin où je vais le relayer.

Lien vers le blog d'Emmanuel Toniutti

19 février 2015

Lancement de l'année 2015 au Cercle du Leadership et intervention au HR Lab de Business Digest

Rencontre organisée par Business Digest (49ème Rencontre du HR Lab), j'ai eu l'occasion d'intervenir le 12 février dernier sur le thème "Nouveau modèle de société, nouveau modèle de leadership"


Après avoir discuté des évolutions de la société actuelle et d'un thème d'actualité, à savoir la "valeur partagée" ("Shared Value") de Michael Porter, nous avons évoqué les évolutions prévisibles et nécessaires du leader de demain. 
Des leaders davantage tournés sur la société, sur la valeur globale de leur action, sur la création de valeurs, en utilisant toutes les formes d'intelligence, l'émotionnelle en premier lieu.


Cette même semaine, nous avons lancé dans le cadre du Cercle du Leadership, que j'ai le bonheur de présider, le thème de l'année 2015, soit justement la "shared value" ! 

Quelques éléments de réflexion (résumant le point de vue de Michael Porter) : 

  • le monde connait de nombreux problèmes mais il devient difficile de les ignorer vu l'hyper-médiatisation;
  • en matière d'impact sociétal, les entreprises sont souvent perçues comme le problème, pas la solution;
  • ces problématiques ont été traitées à ce jour essentiellement via la philanthropie, l'action gouvernementale et les ONG, mais cela ne suffit pas. Pas assez de moyens. La RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) est souvent vue comme le mal nécessaire. or selon Porter, c'est en réalité le coeur de la solution ; 
  • si on ne progresse pas assez vite, c'est par manque de ressources. Il faut aller les chercher là où elles se trouvent, soit dans le monde du business; 
  • le business a intérêt en fait à traiter les problèmes de société ... pour réduire ses coûts en premier lieu. Moins de gaspillage résulte en plus de profit. Les exemples sont nombreux, la pollution, les conditions de travail, la santé, etc. 
  • les entreprises ont intérêt de disposer d'une structure d'éducation dans leur proximité immédiate de haut niveau. C'est l'assurance de trouver les talents qu'elles cherchent. Elles ont ainsi intérêt à financer en commun des programmes pour monter le niveau collectif. Elles en bénéficient au final. 
  • adresser un problème sociétal par le biais d'un "business model" éprouvé, c'est une forme d'évolution du modèle capitaliste, un capitalisme de "nouvelle génération" ... 
  • "shared value" c'est la génération de gains à la fois économiques et sociétaux !
  • les entreprises ne doivent pas chercher à se substituer aux ONG ou aux Etats, mais plutôt à travailler étroitement avec eux. 
Au final, il faut reconnecter le succès de l'entreprise au progrès social. Un écosystème prospère se traduit toujours par plus de bénéfices pour les entreprises qui y évoluent

Pour en savoir plus sur cette théorie :

16 juin 2014

Le Baromètre de l'attractivité de la France 2014 par EY - Un papier / point de vue de ma part y est publié.

Il y a peu sortait le "baromètre de l'attractivité de la France 2014", publié par EY.

Comment attirer l'investissement
étranger en France ? 

Je livre ci-dessous mon propos sur la nécessité de pousser l'entrepreneuriat en France. 


Point de vue de Gérald Karsenti (pages 12 et 13 du document)

La France a inspiré la liberté, mais pas la liberté d’entreprendre

“Nous ne sommes plus dans le temps de la réflexion et du diagnostic, mais dans le temps de l’action et de la transformation.”

Patrie de la liberté et de l’égalité et mère des grandes révolutions à l’origine de notre monde moderne, la France dérange autant qu’elle fascine, si bien qu’aujourd’hui, les observateurs internationaux s’interrogent sur ses errements, espèrent qu’elle sorte de son inertie et, dans cette attente, lui opposent parfois de virulentes critiques à des choix jugés hasardeux. En effet, la France se cherche et avance à tâtons, oscillant entre l’American dream et le Mittelstand industriel allemand, tant et si bien qu’elle renvoie une image peu attractive à l’international. Or, c’est en puisant dans notre propre mythe fondateur, empreint de valeurs révolutionnaires, que nous pourrons susciter à nouveau le désir de France. Seulement voilà : si la passion de la liberté est gravée dans le tempérament national, l’obsession française de l’égalité nuit gravement à la liberté d’entreprendre, distillant un sentiment collectif d’injustice face à la réussite individuelle, là où la liberté d’entreprendre et le succès individuels se fondent dans le creuset du rêve collectif américain.

Notre pays dispose pourtant de tous les ferments d’une nouvelle “rêv-olution” française. Encore faut-il que nous leur offrions une terre fertile pour que l’innovation puisse y voir le jour et y créer croissance et emplois. Or, si la France vénère la matière scientifique pure, elle dénigre la recherche appliquée : “Avoir une idée, oui ! La vendre ? Jamais !”. Or, la grande majorité des innovations à l’origine de la création d’entreprises ne relèvent pas toujours de la science mais du commerce, du marketing, du design... Cette dynamique d’innovation, seule voie possible si nous souhaitons retrouver un rythme de 2% à 3% de croissance, doit être insufflée par une politique d’attractivité des talents.

80 000 étudiants quittent la France chaque année, contre 280 000 qui y viennent, mais parmi lesquels trop peu d’étudiants et de cadres expérimentés originaires des économies émergentes, davantage attirés par les pays anglo-saxons. Faciliter les entrées de ces talents à travers l’octroi sélectif de visa est un moyen de les attirer et de les faire rester en France. Mais il est surtout urgent d’aligner nos règles fiscales, sociales et juridiques sur celles de nos voisins européens et outre-Atlantique, en témoigne l’initiative Start-Up America1, pour attirer les entrepreneurs et les capitaux- risqueurs. Cette attractivité repose sur des conditions de fiscalité personnelle et d’entreprise avantageuses, en particulier avec une fiscalité des plus-values de cession non décourageante, assorties de conditions, à savoir un véritable projet d’implantation soumis à contrôle et assorti d’une interdiction de délocaliser.

La rétention ou l’attraction des talents et des champions de l’innovation repose sur un écosystème fiscal et réglementaire attractif, certes, mais aussi, et surtout, sur la capacité de notre pays à faire rêver et à offrir un cadre de vie agréable. Si nous ne pouvons que saluer le programme French Tech, il manque encore à la France des métropoles technologiques françaises, identifiées et identifiables à travers un récit cohérent, afin d’ancrer le rêve français dans un, ou plusieurs, lieux mythiques. Si aujourd’hui, la plupart des Français ignorent, par exemple, que Grenoble - où HP est implanté aux côtés de nombreuses entreprises internationales innovantes - figure à la 5e place du classement Forbes des villes les plus innovantes au monde, comment un investisseur étranger pourrait-il le savoir ?

Par ailleurs, si nous entendons rendre la France compétitive, la gestion de l’Etat devra reprendre les mêmes fondamentaux que celle de n’importe quelle entreprise : si beaucoup de tentatives d’incursion du privé dans la formation de gouvernements ont pu échouer par le passé, sphères publique et privée doivent travailler de concert, avec la composition de gouvernements mixtes entre hommes d’Etat et membres de la société civile ayant une expérience du monde des affaires et de l’international. Nous ne sommes plus dans le temps de la réflexion et du diagnostic, mais dans le temps de l’action et de la transformation, qui doivent être confiées à des professionnels dotés d’une conscience collective, mais désintéressés de tout enjeu politique.

Si la France veut à nouveau s’autoriser à rêver et faire rêver, elle doit admettre l’inexorable basculement du centre de gravité de l’économie mondiale vers les économies émergentes. Au risque de céder à la tentation d’un fatalisme immobile – tiraillée entre un passé idéalisé et la crainte d’un avenir déclassé – qui la précipiterait dans un nouveau cycle de déclin. La France de Tocqueville et de Chateaubriand, qui bouscule le statu quo et se trouve souvent là où personne ne l’attend, doit produire une synthèse féconde entre son héritage des Lumières et son avenir dans les nouveaux rapports de force à l’œuvre dans la recomposition d’un monde multipolaire.


11 mai 2014

La stupidité comme mode de management (publié dans la Tribune)




Le papier ci-dessous peut sans aucun doute alimenter pas mal de discussions. Je vous laisse vous faire une opinion. Il y a un moment que je voulais le poster sur mon blog et le partager avec mon réseau sur LinkedIn. Voilà c'est fait. Rendez-vous sur mon profil LinkedIn pour y apporter vos commentaires si vous le souhaitez. Bonne lecture !

La stupidité comme mode de management

Publié dans la Tribune, Février 2013
 

La culture de la stupidité serait à l'origine de la crise financière de la City. Une étude anglo-saxonne note que l'intelligence des salariés est systématiquement découragée en temps de crise.

Voilà une étude qui devrait pousser les managers à s'interroger. Un rapport rédigé par les professeurs Andre Spicer (de la Cass Business School, qui fait partie de l'université City University de Londres) et Mats Alvesson (de l'université de Lund, en Suède), suggèrent que la culture au sein des entreprises de services financiers décourage les employés d'utiliser l'ensemble de leurs capacités intellectuelles..... Cela signifie que des questions importantes ne sont pas posées et que les oublis qui en résultent peuvent aboutir à des scandales comme la manipulation du LIBOR.

Dans « A stupdity-Based Theory of Organizations », ces deux professeurs vont jusqu'à indiquer que la série de scandales qui a frappé le monde de la finance en 2012 peut être attribuée à une culture largement répandue de la « stupidité fonctionnelle ». Des entreprises au sein desquelles la connaissance prime, comme les banques, ont développé une culture prônant l'attitude « N'y réfléchissez pas, faites-le. ». Réfléchir trop longuement à des difficultés et poser des questions gênantes sont des attitudes systématiquement découragées.

Quand la bêtise désarme

Les auteurs soulignent que les compétences des employés ne se sont pas réduites, mais qu'une véritable culture organisationnelle s'est développée : « De nombreuses entreprises, où l'intelligence des employés est primordiale, telles que les banques et les sociétés de services professionnels, assurent que les compétences sont à la base de leurs activités. Cependant, en y regardant de plus près, on s'aperçoit que la vérité est à l'opposé de cette affirmation. En réalité, la stupidité prime dans nombre de ces entreprises. Elles ne sont pourtant pas composées de personnes présentant de faibles QI. Habituellement, c'est même loin d'être le cas. Au contraire, ce sont plutôt ces entreprises qui incitent des personnes très intelligentes à ne pas mettre à profit l'ensemble de leurs capacités intellectuelles. Au lieu de cela, les employés sont supposés ne pas trop réfléchir et simplement faire leur travail », explique le professeur Spicer. Comme l'indique Robert Musil dans son opuscule intitulé « De la bêtise », celle-ci « endort la méfiance, désarme ». « On retrouve quelques traces de ce genre de finauderie dans certains rapports de dépendance où les forces sont à tel point inégales que le plus faible essaie de s'en tirer en se faisant passer pour plus bête qu'il n'est. (...) le faible qui ne peut pas irrite moins le détenteur du pouvoir que celui qui ne veut pas », écrit Musil. Mais aussi, comme le souligne cet intellectuel allemand dans cette conférence donnée en 1937, le phénomène de bêtise prend toute sa mesure dans des moments de panique....donc de crise, quand quelqu'un ou un organisme est soumis à une épreuve trop lourde ou une trop longue pression. De fait l'étude parue dans le « Journal of Management Studies » souligne  que la « stupidité fonctionnelle contribue à maintenir et renforcer l'ordre dans les organisations ». Un phénomène bien connu des psychologues qui relèvent dans la peur une suspension d'activité et de l'intelligence, qui pousse à remplacer la qualité des actions par la quantité.

Un mode managérial basé sur la persuasion

Rien d'étonnant donc à ce que des problèmes résultant de cette culture se révèlent d'après les deux professeurs uniquement lors de périodes économiques difficiles. Durant les périodes de croissance, cette culture permet, à l'inverse, aux employés de mieux collaborer et garantit que le travail est accompli de manière efficace et sans soulever de questions. Andre Spicer poursuit : « Quand les employés d'une entreprise posent peu de questions, ils ont tendance à mieux s'entendre et à travailler plus efficacement. Cela leur rend la tâche plus facile : ils en profitent également. » Tout simplement parce que confiance et bienveillance génèrent une autonomie propre à effectuer son travail sans non plus se poser de questions...

Ce qui caractérise ces situations de crise, note les deux auteurs, c'est le développement d'un mode managérial basé sur la persuasion avec force images et symboles visant à manipuler les troupes dans une seule et même direction. Sorte de lobotomisation qui permet de calmer toute velléité de sortir de la route tracée et qui, soulignent les professeurs, « bloque l'action ». Autrement dit, en évitant toute forme de confrontation constructive, les organisations se privent de ce qui fait l'essence même de l'échange des savoirs entre les salariés. Cette étude souligne ainsi à quel point les capacités cognitives des individus peuvent être limitées dès lors que s'instaurent des relations de pouvoir et de domination au lieu de faire appel aux ressources des individus.

"La plus dangereuse des maladies de l'esprit"

En 1937, Musil était visionnaire lorsqu'il déclarait dans sa conférence sur la bêtise : « on parle beaucoup aujourd'hui d'une crise de confiance de l'humanisme, d'une crise qui menacerait la confiance que l'on a mise en l'homme jusqu'ici ; on pourrait ainsi parler d'une sorte de panique sur le point de succéder à l'assurance où nous étions de pouvoir mener notre barque sous le signe de la liberté et de la raison (...) la bêtise « intelligente » entraîne l'instabilité et la stérilité de la vie de l'esprit. Ce n'est pas une maladie mentale. Ce n'en est pas moins la plus dangereuse des maladies de l'esprit, parce que c'est la vie même qu'elle menace ». Par un mode de management qui ne laisse pas de place à la singularité et aux ressources des individus, les organisations se privent de compétences essentielles pour continuer de se développer. Comme le dit le réalisateur belge Jacques Sternberg, peut-être qu'un jour on découvrira que la bêtise n'est rien d'autre qu'un virus".

16 mars 2014

A-t-on besoin d'un chef ?


Un chef ?

Invité à un diner il y a peu, je me suis retrouvé assis à côté d'un professeur en université et chercheur en sciences sociales. Nous étions une bonne quinzaine et les profils étaient variés. 

... ou pas de chef ? Plutôt une équipe !
A un moment donné de la soirée, la discussion s'est portée sur la nécessité ou pas d'avoir un chef. J'ai tendu l'oreille, le sujet m'intéressait. Certains affirmaient qu'il en fallait un, que nous étions fait pour être dirigés et que sans patron, tout allait habituellement à vau-l'eau.  D'autres au contraire soutenaient qu'il n'en était rien et que le monde d'aujourd'hui n'avait nullement besoin d'organigrammes structurés et de systèmes de management élaborés pour que les choses avancent dans la bonne direction. Le professeur était plutôt du côté de ceux qui voulaient des chefs. 

"Et vous ?" me demanda-t-il, étonné de mon silence. 

J'étais en fait trop occupé à écouter. Il est toujours intéressant d'écouter et il est difficile de ne pas parler. On comprend pourtant mieux les argumentaires. Je ne parle pas des idées mais des logiques qui sont utilisées, c'est-à-dire la façon dont les idées sont articulées entre elles pour former une position, un point de vue. Cela fait longtemps que j'ai compris qu'on pouvait faire "thèse-antithèse" sur presque tout. Sur un sujet donné, on peut avoir mille points de vue. Ce qui compte au final, ce n'est pas tant cela, mais le raisonnement qui est tenu. On peut défendre une position à un instant t et quelques mois après une autre sans que cela soit forcément choquant, tout est question de moment et de contexte. 

"Les recherches en éthologie sur le règne animal transposées à l'homme semblent montrer que nous avons besoin d'un chef, lui dis-je. 
- Vous avez raison.  Au bout du compte, même si nous prétendons vouloir plus de liberté, savoir qu'il y a un pilote dans l'avion nous rassure. Vous ne trouvez pas ?
- Je ne sais pas. En fait, ce n'était pas mon avis, mais le résultat de recherches dont je voulais simplement faire état. 
- Mais alors vous votre avis c'est quoi ? 

Avant la guerre, le top du top c'était de passer le bac philo. On était sur les idées. Une femme ou un homme éduqué était avant toute chose cultivé, lettré et capable de manier la langue avec dextérité. Après la guerre, on est entré dans la phase de reconstruction. L'industrie devait être reconstruite et l'ingénieur a pris les rênes du pouvoir. Très vite sortir de Polytechnique ou des Arts et Métiers était préférable à une agrégation de lettres ou de philo. 

Pendant les trente glorieuses (les années 50, 60 et 70), les organisations étaient structurées, hiérarchiques, centralisées en ce qui concerne l'exercice du pouvoir. Le chef a pris toute sa place. C'est lui qui décide, commande, ordonne, structure, nomme, licencie. C'est le chef omniprésent et responsable. Il y a là un rien de paternalisme. Du reste, des grands noms émergent, des entreprises qui portent le nom de leur fondateur. L'entreprise s'identifie à un homme ou une femme. A ce moment là, il faut un chef. 

Avec l'avénement de l'informatique personnelle, puis des réseaux sociaux, de l'internet, l'information se libère, les organisations deviennent moins formelles, on fonctionne en réseaux, on a plusieurs patrons, un hiérarchique et un ou plusieurs fonctionnels et le pouvoir se décentalise. Les délégations arrivent sur celles et ceux qui sont proches du terrain et qui, mis en pouvoir, peuvent décider, accélérer les processus de décision et gagner en vitesse d'exécution. Le pouvoir central perd en contrôle et c'est pourquoi on invente le principe de la gouvernance. 

La gouvernance est un moyen de substituer aux structures pyramidales habituelles un autre forme de contrôle. 

On est passé d'un modèle dit mécaniste à une approche dite organique. Dans le premier cas, il y a un chef. Dans le second, il y en a plusieurs ou pas, cela dépend de la façon dont on veut définir un chef. 

J'ai terminé ainsi : "Vous voyez le monde a profondément changé en quelques décennies et l'entreprise a dû s'y adapter. Même si la notion de chef ou patron a évolué dans le temps, nous avons toujours besoin de quelqu'un pour prendre les décisions importantes ... les directions. On parle du reste de dirigeant ! Celui qui dirige, qui guide, qui trace la route."

Mais rentré chez moi, j'ai poursuivi mes recherches. J'ai trouvé deux articles intéressants, qui n'embrassent pas le même point de vue, mais qui sont intéressants tous deux. 

Les voici : 



A vous de vous faire une opinion ! Bonne lecture.


 

05 janvier 2014

Quel leadership face à la révolution numérique ?

Je voulais vous faire part d'un événement important qui s'est tenu en Mai 2013 dans les locaux d'HP France à Boulogne sur le thème suivant : "Quel leadership face à la révolution numérique ?". Cela date un peu mais le thème est important et plus que jamais d'actualité. 

Cela me permet en même temps de vous faire découvrir le site du Cercle du Leadership dont la vocation est de réunir des dirigeants de grandes entreprises désireux de promouvoir une vision et des actions innovantes en matière de management et de leadership :


Voici la synthèse de l'événement réalisée par le Cercle du Leadership :


Cycle d’études 2013 : « le sentiment d’un chaos ou l’émergence d’un nouveau monde »

Conférence avec le concours de HP à l’auditorium de HP France



A l’invitation de HP France, Le Cercle du leadership a tenu ce 30 mai 2013, la troisième conférence de son cycle d’études 2013 sur le thème de la révolution numérique.
La plupart des dirigeants des sociétés traditionnelles n’ont qu’une connaissance limitée des enjeux et des possibilités qu’offrent les NTIC. Ils se trouvent ainsi démunis face à ce qui constitue une formidable révolution industrielle, sans doute l’une des plus importantes, la révolution numérique, ce qui contribue au sentiment de chaos. Il s’ensuit des décisions stratégiques ou d’organisation souvent stériles ou dépassées.
Dans un premier temps, Marc Padovani, Chief Technical Officer de HP France, nous a rappelé quelles étaient toutes les nouveautés en matière de higt tech, de manière ludique et pédagogique, pour nous remettre dans le jeu et dans le vocabulaire des NTIC.
Puis nous nous sommes demandé en quoi les NTIC modifiaient les conditions d’exercice de notre propre leadership ; comment elles ouvraient de nouveaux modes d’accès à la connaissance ; quel rôle elles laissaient aux managers ; quelle organisation du travail il pouvait en découler ; quelles nouvelles frontières elles ouvraient aux entreprises ; et surtout quelles remises en cause personnelles elles nécessitaient.
Nous avons partagé les réflexions menées par Gérald Karsenti, Président de HP France, interviewé par Oliver de Conihout, Président de « l’Espace Dirigeants » et membre du Cercle du leadership, ainsi que les témoignages de deux jeunes créateurs de start up, Jakob Haesler, Président de Tinyclues et Olivier Gorce, Associé de QAPA.fr, tous deux interviewés par Arnaud Franquinet, DRH de Grant Thornton et membre du Cercle du leadership.

Auditorium Siège HP France







 
 
Marc Padovani met l’accent sur le déluge numérique qui bouleverse nos habitudes : chacun peut aujourd’hui se procurer pour une somme d’environ 75 Euros, une capacité mémoire de 1 Tera octets ce qui représente 2,4 kilomètres de dossiers papiers empilés, soit....7 tours eiffel
 
 


Le déluge numérique : faits ou illusions

Pour situer les choses, 1 péta octet représente 1000 Tera octets soit 7000 Tour Eiffel or Google traite environ 20 pétas par jour.
La grande Bibliothèque de France est en route pour les 2 petas.
La taille de tout internet était estimée en novembre 2011 a 5000 pétas soit 5 exas. Fin 2013, il atteindra 11 exas.
Le cerveau humain quant à lui contient potentiellement (mais ne sait pas utiliser), 11 exas octets (1 exa = 1000 petas) ce qui signifie qu’en théorie il contient tout internet.
Le futur big data center sera radicalement différent des architectures matérielles et physiques actuelles.
De nouveaux usages, tous très demandeurs de ressources (HPC, Cloud , jeux en réseau , Big Data Hadoop, In Memory Computing), ont montré la limite de ces architectures en introduisant les notions de fermes de calcul. Le parallélisme massif, la localisation des données et l’aplatissement du réseau pour répondre à ces nouveaux besoins, qui, il y a encore peu étaient l’exception, deviennent la norme.
La prochaine étape est la levée définitive des frontières entre serveur, stockage et réseau. Cette levée des frontières doit impérativement être liée à la disposition quasi infinie des ressources à bas coût. Un seul exemple : l’ensemble de l’industrie du software repose sur la double assertion que la mémoire est finie et que les disques sont lents. Pagination, sb, shared memory deviennent des objets du passé si nous savons mettre 1Peta de mémoire non volatile, travaillant à la vitesse de la DRAM, dans un serveur.
 
 
Quelques chiffres ou données sur le déluge numérique
 
  • 1 milliard de téléphones portables vendus dans le monde en 2012.
  • 700 millions de smartphones, soit une progression de 45 % par rapport à 2011.
  • 4 milliards de téléphones mobiles en 2015 (population estimée à la même époque 7,5 milliards).
  • 50 % des Américains possèdent un smartphone.
  • En 2016 l’Inde et le Brésil devanceront les USA en matière d’équipement de smartphones.
  • Les outils personnels de communication (smartphones, tablettes Portables …) dépassent en qualité ceux que les entreprises mettent à la disposition de leurs salariés.
  • La géolocalisation associée aux achats en ligne permet d’établir un marketing ciblé sur chaque utilisateur en temps réel.
  • Nous sommes la première civilisation à abandonner des pans entiers de notre vie privée à des opérateurs sans aucun contrôle.
  • Les NTIC permettent d’ores et déjà le « work at home » dans des conditions optimum avec une économie de coûts réelle pour l’entreprise. De ce point de vue, elles révolutionnent potentiellement les liens sociaux, les transports, les coûts du poste de travail.
  • Les NTIC ont totalement décloisonné vie professionnelle et vie privée.
  • Les hybrides continuent de se développer : un même appareil rempli toutes les fonctions (téléphone, PC, TV, jeux, achats, robotique domestique ….).
  • Une famille occidentale de deux enfants possède environ 10 écrans à domicile.
  • L’imprimante 3D est la prochaine grande révolution numérique : elle bousculera les habitudes d’achats et de fabrication puisqu’on fabriquera son produit à domicile. On imprimera des revolvers et bientôt des pizzas
  • Le marché de l’économie numérique 3D représentera 3 Milliards de dollars en 2018.
  • Google, Facebook, linkedin… possèdent plus d’informations sur les citoyens que tous les états et gouvernements réunis.
  • 118 milliards de mails sont échangés chaque jour dans le monde.
  • 2,45 Milliard de contenus Facebook sont échangés quotidiennement.
  • En 2011, il fallait 2 jours pour générer 5 exaoctets. En 2013, il en faudra 10 minutes.
  • Chaque minute dans le monde :
    • 82 millions de mails
    • 2,3 Millions de recherche Google
    • 300.000 tweets
    • 13.500 nouveaux sites web
  • 32 % des français utilisent un ordinateur pour regarder un programme TV.
  • 60 millions de tablettes vendues dans le monde en 2011. 370 millions en 2016.
  • Le nombre de puces électroniques est en doublement chaque année depuis 1975.
  • 70 millions de sites dans le monde en 2005, 470 millions aujourd’hui.
  • En 2009, 2 mois de production U Tubes donne plus d’images que toute la production télévisuelle réunie de l’année.
  • En France, un individu passe 3h48 par jour devant un écran (hors travail) ce qui correspond à un mi-temps de travail (20 heures par semaine).



Une rénovation nécessaire de notre mode de leadership
Trier et distribuer l’information

Lors de notre matinale du 14 février dernier qui a démarré le cycle de l’année sur le sentiment d’un chaos, nous avons notamment mis en évidence l’impact des nouveaux modes d’accès à la connaissance. L’information est accessible à tous, est-elle pour autant comprise ? Le leader semble ne plus être l’homme omniscient, mais celui qui relie les autres entre eux dans un écosystème efficient.

Gérald Karsenti partage ce point en soulignant qu’un des principaux enjeux du dirigeant devient la capacité à gérer l’information ; il doit en effet être capable de la digérer, de la trier, de la distribuer à la bonne personne, au bon moment, pour un résultat optimum. Cela requiert des qualités de nature différente : rapidité, réactivité, mais aussi discernement, empathie et proximité avec ses collaborateurs. Dans l’économie moderne, le dirigeant qui garde l’information à son profit est définitivement OUT ; il devient un destructeur de valeur, car il brise le flux d’informations qui est aujourd’hui à l’origine de toutes les décisions. Olivier de Conihout évoque quant à lui un leadership collaboratif, loin du leadership hiérarchique basé sur la seule vertu du commandement.

Olivier de Conihout et Gérald Karsenti
Olivier de Conihout et Gérald Karsenti




Gérer sa sphère personnelle
Gérald Karsenti
 
La révolution numérique abroge les frontières entre vie privée et vie professionnelle ; l’irruption des mails et sms accélèrent toutes les prises de décisions mais peut se révéler désastreuse si elle n’est pas maitrisée. Chacun doit trouver son propre mode de traitement de cette question. Pour Gérald karsenti l’impératif est de ne pas traiter les mails et sms dans l’instant, mais de les traiter par lot de préférence sur des plages de temps – généralement le soir- de sorte que ce traitement ne rentre pas en conflit avec le nécessaire contact physique avec les collaborateurs.
Pour développer ses idées, Gérald Karsenti privilégie le blog au détriment du tweet, qu’il juge « dangereux et piégeur pour un dirigeant car trop dans l’immédiateté ». 
Il a d’ailleurs créé son propre blog :

 

Devenir le coach de ses salariés !

Mais c’est sur le terrain de son propre leadership que le dirigeant doit essentiellement se remettre en cause.

Gérald, citant l’exemple de David Fattal -un jeune ingénieur HP reconnu mondialement comme l’un des meilleurs de sa génération-, n’hésite pas à dire que le dirigeant devient aujourd’hui le coach de ses meilleurs elements.

 
Biographie de Gérald Karsenti
PDG de HP France, Gérald Karsenti a été nommé à la tête de la filiale française HP France le 1er Juillet 2011. Responsable de la conduite des activités liées à un vaste portefeuille composé d’équipements informatiques, de logiciels et de services, il pilote le développement de l’activité et de la croissance en France. Gérald Karsenti occupe également les fonctions de Vice-président, Entreprise Services France, entité en charge de la transformation et des activités d’infogérance. Gérald Karsenti a rejoint HP France en tant que Vice-Président et Directeur Général des ventes de l’activité Enterprise Business en janvier 2007 où il a conduit la transformation de l’activité, obtenant des succès notables et reconnus en termes de croissance et de gains de part de marché. Avant de rejoindre HP, Gérald était président d’une filiale de services dédiée aux applications au sein du groupe Capgemini, puis directeur Général Adjoint de Sogeti France. Gérald a également travaillé près de 18 ans chez IBM où il a occupé de nombreux postes de vice-président au sein de diverses entités, notamment à la tête de la division « IBM Software Group ». Son parcours professionnel l’a amené à occuper des postes internationaux en Russie, au Japon, aux Etats-Unis et pour la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique. Diplômé de l’IEP de Paris (Sciences Po Paris), Gérald Karsenti est également titulaire d’un Master spécialisé de HEC Paris, d’un diplôme de l’université d’Oxford et d’un Master en finance. Auteur de plusieurs ouvrages, le dernier étant « Le Business Model des Services » aux Editions d’Organisation (novembre 2010), Gérald est également professeur affilié à HEC Paris où il enseigne le leadership et la transformation des entreprises.
Gérald est marié et père de deux enfants.
Il doit se mettre en situation de les entourer dans les domaines où ils ne sont pas excellents pour les amener au plus haut niveau ; il doit être capable de déléguer en contrôlant, c’est à dire en connaissant suffisamment les techniques et les produits utiles au développement de son entreprise ;
 
Compenser la hightech par une présence physique !
Cette entreprise numérique est éclatée. Elle est mondiale, globale. Elle est parfois immatérielle : on travaille n’importe où ; n’importe quand ; l’unité de lieu et d’espace deviennent un leurre ? Chez HP France par exemple, il n’y a plus de bureaux : on se pose là où il y a de la place, cela rend plus nécessaire que jamais de trouver des occasions de maintenir un lien physique avec ses collaborateurs par tous les moyens possibles pour compenser la froideur des organisations modernes.

Les nouvelles frontières de l’entreprise
 
Ces dernières considérations nous amènent tout naturellement à évoquer, avec nos deux derniers invités, Olivier Gorce (Qapa.fr) et Jakob Haesler (Tinyclues), comment les nouvelles technologies modifient les frontières de l’entreprise.
 
L’économie de l’échange.
 
Pour Olivier Croce, sales director et Partner de QAPA, site de recrutement par internet, l’économie numérique modifie considérablement la gestion des ressources humaines. La priorité de QAPA, est de matcher le profil du candidat, avec les besoins de compétence du futur employeur. QAPA, tel Meetic en son temps, apporte un concept innovant en matière de rencontre professionnelle. Le marché de l’emploi est difficile, de nombreux sites poussent à remplir leur CV en ligne, chez QAPA, pas de CV, mais des compétences développés au fil de la carrière ou dans la sphère privée. Un fort accent mis sur le « Matching de compétences », car l’avenir du CV est incertain, il va surement disparaitre. Le temps réel est privilégié : toute une profession de recruteurs doit se remettre en question. L’économie numérique c’est l’économie de l’échange instantané.

Jakob Haesler, Arnaud Franquinet et Olivier Croce

 
La nécessité de la douceur…

 
Jakob Haesler
 
 
Pour Jakob Haesler, Président de Tinyclues, société de data minding, c’est toute la relation humaine à l’intérieur de l’entreprise qui est modifiée par la high tech. Les TPE et start up vont se développer au détriment des grosses structures, apportant un nouveau style de management. Dans cet univers, la relation hiérarchique est dépassée ; le bureau n’existe plus, laissant place à un espace libre et ouvert, à la carte. Le plus qualifié, ou le plus ancien doit apprendre du plus jeune (le reverse coaching) ; il doit remettre en cause son savoir en permanence « le release 2.0 »
Dans cette organisation débridée, où il faut gérer l’activité en mode projet ; où il faut partager le même espace de travail avec les autres ; où l’idée de hiérarchie est absente, le sens relationnel devient primordial, l’entente entre les collaborateurs essentielle.
Devant cette nécessité, Jakob Haesler n’hésite pas à en appeler à des qualités rarement évoquées par les dirigeants : la douceur, l’empathie, la bienveillance… de quoi surprendre dans l’univers froid et glacé du numérique.

Beau paradoxe !

Pour conclure, quels faits saillants ?

Cinq ou six thèmes saillants sont mis en exergue pendant la conclusion par Philippe Wattier et Gerald Karsenti.
 
 
Philippe Wattier
 
Le leadership collaboratif -celui qui consiste à aider les autres, à les relier entre eux- supplante le leadership de commandement.
Le leadership que l’on développe par sa capacité d’influence sur son environnement devient lui aussi plus signifiant que le leadership hiérarchique qui constituait jusqu’alors la pierre angulaire de l’organisation traditionnelle.
Le leadership de flux l’emporte sur le leadership de stock. Le dirigeant ne gère plus des stocks (stocks de connaissances ou de certitudes, stocks de collaborateurs, stocks de produits), il ne gère plus que des flux volatiles qu’il faut savoir utiliser à bon escient dans une unité de temps extrêmement réduite.
 
 
 

L’organisation pyramidale semble révolue et laisse place à une organisation en projet, déformable, adaptable et auto destructible. Le leader doit inventer sa propre résilience et celle de son organisation à tout moment.
Enfin, le leader devient le coach de ses collaborateurs et surtout des meilleurs d’entre eux. Il doit les choisir plus compétents que lui et s’attacher à les faire progresser dans les domaines où ils n’excellent pas encore …
 
Revenant au final sur une idée développée par Jakob Haesler, Gérald Karsenti, en guise de conclusion, choisit de mettre l’accent sur l’importance de la relation directe, physique et conviviale pour compenser l’immatérialité de la nouvelle entreprise.
L’entreprise du futur, soudée par sa machine à café en quelque sorte !

 
Gérald Karsenti
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Prise de notes : Sébastien Jai, MBA IAE d’Aix
Synthèse des débats : Philippe Wattier
Photos : Emmanuelle Solinski